OCIO Y OCIOS DU LOISIR AUX LOISIRS (ESPAGNE XVIIIe – XXe SIÈCLES)
ESPAGNE XVIIIe â XXe SIÃCLES - CREC ESPAGNE XVIIIe â XXe SIÃCLES - CREC
Centre de Recherche sur l’Espagne Contemporainecette entreprise d'embrigadement, qui fait de l'enfant le porte-parole de la doctrine dujournal, nous est donnée par cet autre conte écrit par un jeune lecteur, Un cuento deverdad, dans lequel il explique : « Nuestras dos camaradas eran tan entusiastas deFalange, que hasta en sus juegos se dedicaban a hacer vestidos de Flecha a susmuñecas » 35 . La propagande déployée par ces revues est, donc, une indéniable réussite,puisque jusque dans ses loisirs les plus innocents (mais le sont-ils jamais?) l'enfant seconduit en parfait petit franquiste. Que les loisirs proposés par ces journaux soientconçus, à la fois, comme objet d'instruction et de divertissement explique sans aucundoute ce résultat.Des loisirs instructifs : instruir deleitando ou l'endoctrinement insidieuxLes stratégies déployées par ces revues sont efficaces, car habiles. Elles reposent surle principe de « instruir deleitando ». Pour cela, la propagande a recours aux jeux et aurire : il s'agit d'amuser pour mieux convaincre, le plaisir étant le meilleur atout de lapropagande, comme les revues l'ont compris. Dès son premier numéro, Flechas yPelayos, « la nueva revista nacional infantil » résume ces principes :Todo a vuelta de historietas, de dibujos, de cuentos, de chistes, y cantares que haganbrotar la risa inocente, que despierten la viva emoción, que mantengan la sana alegría, queagudicen la curiosidad, que sacudan los resortes de la imaginación, que amplíen los horizontesde la inteligencia, que diviertan, que instruyan, que distraigan y que eduquen 36 .Deux ans plus tôt, dans son premier numéro, le journal Pelayos, exposait déjà lesmêmes objectifs aux petits lecteurs carlistes, par la bouche de Carlos, un « requeté »,grand frère d'un jeune Pelayo :No temáis que os canse contándoos cosas muy serias, como para los mayores. ¿Habéisoído decir alguna vez que a Santa Teresa de Jesús no [sic] le gustaban los santos tristes? Puesa nosotros, los tradicionalistas, tampoco nos gustan los niños serios. Jugando y riendoalegremente, desde estas páginas dedicadas al Rey, en vuestra revista, os contaré cuentos muybonitos, no dejéis de leerlos. Además serán cuentos que han sucedido, y eso tiene muchomérito 37 .Ces déclarations de principes ont pour objectif de rassurer et de séduire enfants etparents, les uns par la promesse d'un divertissement, les autres par celle de loisirséducatifs, avec un mot d'ordre commun pour tous, la variété des rubriques proposées.35 « Un cuento de verdad », in Flechas, n ° 5, 6-XII-1936, p. 3.36 « La nueva revista nacional infantil », in Flechas y Pelayos, n ° 1, 11-XII-1938, p. 8. C'est moi quisouligne.37 « Por Dios, por la Patria y el Rey », in Pelayos, n ° 1, 27-XII-1936, p. 9-10.ISSN 1773-0023
152DU LOISIR AUX LOISIRS (ESPAGNE XVIIIe – XXe SIÈCLESC'est une des règles des magazines pour enfants que la propagande franquiste (commeplus tard, en France, la propagande hitlérienne) respecte, pour mieux attirer à elle lesenfants. Ces revues proposent, donc, des supports variés, textuels et iconographiques,avec un dosage équilibré de rubriques humoristiques et sérieuses. Si certaines activitésparaissent inoffensives, alors que d'autres sont des supports de propagande déclarés,toutes, en réalité, ont le même objectif, mêler divertissement et embrigadement. Il s'agit,comme Pascal Ory l'a démontré, de « coloniser » par la propagande l'espace de jeuenfantin 38 .L'analyse d'un numéro complet de Flechas y Pelayos démontre l'habileté desrédacteurs qui mêlent intelligemment des rubriques diverses, pour induire chez lesjeunes lecteurs des comportements et des plaisirs complémentaires. Ainsi, le numéro 17de la revue, du 2 avril 1939, compte, sur 24 pages, 9 bandes-dessinées (dont 2 encouleurs dans les dernières pages, Aventuras extraordinarias de Teodorito y la chachaet La tumba submarina) dont certaines sont des productions originales du magazine (ElFlecha guerrero y el tesoro, par exemple), alors qu'autres sont plus anciennes, commePopeye. S'y ajoutent, sur une double page, un feuilleton en plusieurs épisodes, Héroesde la Patria, signé par Justo Pérez de Urbel, le directeur de la revue, et illustré par desdessins d'Aróstegui, un conte très court sur la Guerre (Recuerdo de la guerra) et unerubrique de deux pages pour les petites filles, qui se divise en une histoire de Mari-Pepa(Dando una vuelta) et en une page de courriers des lectrices. Viennent, ensuite, lesrubriques plus sérieuses, comme l'enseignement religieux (Doctrina y estilo et Estampasbíblicas), l'Histoire (Historia gráfica de España) et les références à l'actualité, à proposde la « Organización juvénile » de Barcelone, puis, enfin, les pages de divertissement,avec le sport, la page Curiosidad, accompagnée de photos, les rubriques Philatélie,Collaboration des Lecteurs, Jeux et, pour terminer, une dernière page de découpagepour obtenir une jolie figurine de bergère. À la lecture de cet inventaire, on découvre unmagazine extrêmement complet et distrayant, capable d'occuper longuement les lecteursqui trouvent entre ces pages un appareil de propagande d'autant plus efficace qu'ils'appuie sur des activités familières des enfants (dessin, jeux, rébus, devinettes,contes…), dont il détourne habilement le contenu. Le plaisir, qui repose sur un effet dereconnaissance et de découverte, est, donc, constamment renouvelé, sans jamais cesserd'être accompagné par un embrigadement plus ou moins voilé. On le retrouve danstoutes les pages de ces revues, y compris dans les rubriques les moins à même d'êtreinvesties, a priori, par ces pratiques de propagande, comme les pages de divulgationscientifique. Au milieu des informations « sérieuses », se mêlent des phrases de38 Voir Pascal ORY, Le petit nazi illustré…, p. 39.ISSN 1773-0023
- Page 102 and 103: Centre de Recherche sur l’Espagne
- Page 104 and 105: Centre de Recherche sur l’Espagne
- Page 106 and 107: Centre de Recherche sur l’Espagne
- Page 108 and 109: Centre de Recherche sur l’Espagne
- Page 110 and 111: Centre de Recherche sur l’Espagne
- Page 112 and 113: Centre de Recherche sur l’Espagne
- Page 114 and 115: Centre de Recherche sur l’Espagne
- Page 116 and 117: Centre de Recherche sur l’Espagne
- Page 118 and 119: Centre de Recherche sur l’Espagne
- Page 120 and 121: Centre de Recherche sur l’Espagne
- Page 122 and 123: Centre de Recherche sur l’Espagne
- Page 124 and 125: Centre de Recherche sur l’Espagne
- Page 126 and 127: Centre de Recherche sur l’Espagne
- Page 128 and 129: Centre de Recherche sur l’Espagne
- Page 130 and 131: Centre de Recherche sur l’Espagne
- Page 132 and 133: Centre de Recherche sur l’Espagne
- Page 134 and 135: Centre de Recherche sur l’Espagne
- Page 136 and 137: Centre de Recherche sur l’Espagne
- Page 138 and 139: Centre de Recherche sur l’Espagne
- Page 140 and 141: Centre de Recherche sur l’Espagne
- Page 142 and 143: Centre de Recherche sur l’Espagne
- Page 144 and 145: Centre de Recherche sur l’Espagne
- Page 146 and 147: Centre de Recherche sur l’Espagne
- Page 148 and 149: Centre de Recherche sur l’Espagne
- Page 150 and 151: Centre de Recherche sur l’Espagne
- Page 154 and 155: Centre de Recherche sur l’Espagne
- Page 156 and 157: Centre de Recherche sur l’Espagne
- Page 158 and 159: Centre de Recherche sur l’Espagne
- Page 160 and 161: Centre de Recherche sur l’Espagne
- Page 162 and 163: Centre de Recherche sur l’Espagne
- Page 164 and 165: Centre de Recherche sur l’Espagne
- Page 166 and 167: Centre de Recherche sur l’Espagne
- Page 168 and 169: Centre de Recherche sur l’Espagne
- Page 170 and 171: Centre de Recherche sur l’Espagne
- Page 172 and 173: Centre de Recherche sur l’Espagne
- Page 174 and 175: Centre de Recherche sur l’Espagne
- Page 176 and 177: Centre de Recherche sur l’Espagne
- Page 178 and 179: Centre de Recherche sur l’Espagne
- Page 180 and 181: Centre de Recherche sur l’Espagne
- Page 182 and 183: Centre de Recherche sur l’Espagne
- Page 184 and 185: Centre de Recherche sur l’Espagne
- Page 186 and 187: Centre de Recherche sur l’Espagne
- Page 188 and 189: Centre de Recherche sur l’Espagne
- Page 190 and 191: Centre de Recherche sur l’Espagne
- Page 192 and 193: Centre de Recherche sur l’Espagne
- Page 194 and 195: Centre de Recherche sur l’Espagne
- Page 196 and 197: Centre de Recherche sur l’Espagne
- Page 198 and 199: Centre de Recherche sur l’Espagne
- Page 200 and 201: Centre de Recherche sur l’Espagne
Centre de Recherche sur l’Espagne Contemporainecette entreprise d'embrigadement, qui fait de l'enfant le porte-parole de la doctrine dujournal, nous est donnée par cet autre conte écrit par un jeune lecteur, Un cuento deverdad, dans lequel il explique : « Nuestras dos camaradas eran tan entusiastas deFalange, que hasta en sus juegos se dedicaban a hacer vestidos de Flecha a susmuñecas » 35 . La propagande déployée par ces revues est, donc, une indéniable réussite,puisque jusque dans ses loisirs les plus innocents (mais le sont-ils jamais?) l'enfant seconduit en parfait petit franquiste. Que les loisirs proposés par ces journaux soientconçus, à la fois, comme objet d'instruction et de divertissement explique sans aucundoute ce résultat.Des loisirs instructifs : instruir deleitando ou l'endoctrinement insidieuxLes stratégies déployées par ces revues sont efficaces, car habiles. Elles reposent surle principe de « instruir deleitando ». Pour cela, la propagande a recours aux jeux et aurire : il s'agit d'amuser pour mieux convaincre, le plaisir étant le meilleur atout de lapropagande, comme les revues l'ont compris. Dès son premier numéro, Flechas yPelayos, « la nueva revista nacional infantil » résume ces principes :Todo a vuelta de historietas, de dibujos, de cuentos, de chistes, y cantares que haganbrotar la risa inocente, que despierten la viva emoción, que mantengan la sana alegría, queagudicen la curiosidad, que sacudan los resortes de la imaginación, que amplíen los horizontesde la inteligencia, que diviertan, que instruyan, que distraigan y que eduquen 36 .Deux ans plus tôt, dans son premier numéro, le journal Pelayos, exposait déjà lesmêmes objectifs aux petits lecteurs carlistes, par la bouche de Carlos, un « requeté »,grand frère d'un jeune Pelayo :No temáis que os canse contándoos cosas muy serias, como para los mayores. ¿Habéisoído decir alguna vez que a Santa Teresa de Jesús no [sic] le gustaban los santos tristes? Puesa nosotros, los tradicionalistas, tampoco nos gustan los niños serios. Jugando y riendoalegremente, desde estas páginas dedicadas al Rey, en vuestra revista, os contaré cuentos muybonitos, no dejéis de leerlos. Además serán cuentos que han sucedido, y eso tiene muchomérito 37 .Ces déclarations de principes ont pour objectif de rassurer et de séduire enfants etparents, les uns par la promesse d'un divertissement, les autres par celle de loisirséducatifs, avec un mot d'ordre commun pour tous, la variété des rubriques proposées.35 « Un cuento de verdad », in Flechas, n ° 5, 6-XII-1936, p. 3.36 « La nueva revista nacional infantil », in Flechas y Pelayos, n ° 1, 11-XII-1938, p. 8. C'est moi quisouligne.37 « Por Dios, por la Patria y el Rey », in Pelayos, n ° 1, 27-XII-1936, p. 9-10.ISSN 1773-0023