Galerie Enrico Navarra
Dwellings - Charles Simonds Dwellings - Charles Simonds
•Picaresque Landscape•, 1976, installation I installation, MoMA, New York. Collection Musee national d'Art moderne, Centre Georges Pompidou, Parisown way to live with these lost places and times. Each This vision of the golden bowl, "a world within world, "of us must enter into the state of abandonment alone. found again in Thomas Cole's dreamlike Giant's Chalice,In my own case, a favorite vision comes to mind. It links stands for transience and for a qualification of the importheartist by way of Thomas Cole's The Giant's Chalice tance of human history and achievement. It represents(1833, The Metropolitan Museum, New York) and Max a fleeting world in an infinite universe. For perched onErnst's La Ville Entiere, a vision of a world before the the rim of the chalice are cities and temples. As soonadvent of man or after his demise with Nova/is's "Heinrich as the giant raises it to his lips, this unknown civilizationvon Ofterdingen," in which an angel spirits the narrator will be gripped by panic, and a moment later will haveinto the sky, where he sees the earth from a bird's-eyeview.The child-angel "flew with us so high that the earth image leads us to the fragile evocations of transienceceased to be. What we feel in view of this puissantmerely looked like a golden bowl, ornamented with the which Simonds attempts with every new city he founds.most delicate chasing."They belong to the epiphanies in art, directed onlyby surprise and no-causality. They reveal a profoundexistential concern, in which the question of existencetakes priority to anything the imaginary inhabitants ofSimonds' Dwellings may have done or believed. W. S.Translated from German by John William Gabriel21
Je me souviens... Jean-Louis Prat«Dwelling .. , detail I detail, rue des Cascades, Paris, 1975Je me souviens de Ia decouverte de l'ceuvre deCharles Simonds a New York - surpris et emerveillepar cet univers a !'inverse de celui jusqu 'alors proposepar l'art d'aujourd'hui- qui semblait prendre naissancedans les reves de civilisations englouties. Je me souviensde I' argile, materiau fragile et sensuel, qui eveillaitles souvenirs, les jeux, le modelage, le charme et lesilence d'autres lieux enfouis dans Ia memoire. Je mesouviens d'avoir eprouve le sentiment intense de possessionprocure par cette ceuvre nouvelle et sculptee,jouet parfait que voudrait real iser tout enfant, qui saitpourtant, intuitivement, que cet univers inventif ne peutetre propose que par l'adulte, createur.Je me souviens encore de l' irreelle presence de Iasculpture congue par Charles Simonds pour le WhitneyMuseum, ceuvre inaccessible nichee pour l'eternitedans un escalier, dans ce batiment ample et cubique,symbole de Ia culture americaine et edifie par MarcelBreuer. Je me souviens de ce sentiment de quietudequi jaillit de cette ceuvre- l'infiniment petit s'inserantdans l'infiniment grand- ou les souvenirs a decryptersurgissent de ce monde fragile et malleable congu pourun monde apparemment immuable.J'ai le souvenir vivace de cet espace nouveau, de cettesculpture incongrue, deja emblematique, qui interrogeet donne a Ia fois tant de reponses. Mais «Ia reponseest le malheur de Ia question», comme l'ecrit MauriceBlanchot. Dans ce cas precis, assurement, le mystereest apprivoise par cet univers mythique, etrange etheureux, et puise sa force dans le monde difficile, cruelet irreel de cette ville majestueuse, belle et intolerable aIa fois, vivante et brutale, solidement implantee dans legranit de Manhattan, ou le beton s'allie au bronze, sansjamais songer a des materiaux faits pour Ia main del'homme. Dans cette ville ou nulle place n'est laissee aIa liberte de Ia terre et au soin que tout etre doit lui apporter,seule Ia construction d'un monde d'airain semblepouvoir repondre a Ia provocation de Ia vie, a sa fragileconscience.confronter, poetiquement, au gigantisme de Ia realite.Sans le moindre conflit, ces deux mondes cohabitent etse completent. L'esprit entreprend des fouilles et revelece qu'il ne faut fondamentalement pas oublier. Le createurlui donne l'espace et Ia forme, le materiau antique etpourtant novateur se surprend, par Ia force du souvenir,a faire acte de sculpture. De cette ceuvre labyrinthiquedont Ia mise en scene distinctive reconstitue Iatopographie enterree et apparente de forteresses envoie d'edification, ou de perdition, l'homme semble absent,mais son ame en aucun cas n'a disparu; il paraltseulement avoir delaisse pour un temps ce chantier,avoir abandonne ce lieu, pour se consacrer a un autre,plus prolifique. Des espaces silencieux surgissent destenebres, emergent de leurs racines, et le concepteurfait toujours corps avec Ia terre dont il est issu. Cetteterre, providentielle et feconde, reproduit desormais Iavie de ces ruines depeuplees pour donner naissance,au travers des souvenirs, a l'esprit et sa suggestiverepresentation.Au seuil d'une aube nouvelle, Charles Simonds nousentralne, avec une terre eperdument recherchee, areconsiderer le temps et lui donner, en le redecomposant,une nouvelle tension et substance, pour lui attribuerune realite maintenant definissable, mais toujoursinsaisissable. Celle-ci envahit ainsi, par une autre dimensionet par une autre representation , une sculpture forteet differenciee. J.-L. P.Mais les symboles, les souvenirs, les etres, temoignentd'un univers plus docile et l'infiniment petit atteste dureve enfin apprivoise qui peut des lors, et sans crainte, se22
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- Page 62 and 63: Smear, 1986Argile et bois15,2 x 76,
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Je me souviens... Jean-Louis Prat«Dwelling .. , detail I detail, rue des Cascades, Paris, 1975Je me souviens de Ia decouverte de l'ceuvre deCharles Simonds a New York - surpris et emerveillepar cet univers a !'inverse de celui jusqu 'alors proposepar l'art d'aujourd'hui- qui semblait prendre naissancedans les reves de civilisations englouties. Je me souviensde I' argile, materiau fragile et sensuel, qui eveillaitles souvenirs, les jeux, le modelage, le charme et lesilence d'autres lieux enfouis dans Ia memoire. Je mesouviens d'avoir eprouve le sentiment intense de possessionprocure par cette ceuvre nouvelle et sculptee,jouet parfait que voudrait real iser tout enfant, qui saitpourtant, intuitivement, que cet univers inventif ne peutetre propose que par l'adulte, createur.Je me souviens encore de l' irreelle presence de Iasculpture congue par Charles Simonds pour le WhitneyMuseum, ceuvre inaccessible nichee pour l'eternitedans un escalier, dans ce batiment ample et cubique,symbole de Ia culture americaine et edifie par MarcelBreuer. Je me souviens de ce sentiment de quietudequi jaillit de cette ceuvre- l'infiniment petit s'inserantdans l'infiniment grand- ou les souvenirs a decryptersurgissent de ce monde fragile et malleable congu pourun monde apparemment immuable.J'ai le souvenir vivace de cet espace nouveau, de cettesculpture incongrue, deja emblematique, qui interrogeet donne a Ia fois tant de reponses. Mais «Ia reponseest le malheur de Ia question», comme l'ecrit MauriceBlanchot. Dans ce cas precis, assurement, le mystereest apprivoise par cet univers mythique, etrange etheureux, et puise sa force dans le monde difficile, cruelet irreel de cette ville majestueuse, belle et intolerable aIa fois, vivante et brutale, solidement implantee dans legranit de Manhattan, ou le beton s'allie au bronze, sansjamais songer a des materiaux faits pour Ia main del'homme. Dans cette ville ou nulle place n'est laissee aIa liberte de Ia terre et au soin que tout etre doit lui apporter,seule Ia construction d'un monde d'airain semblepouvoir repondre a Ia provocation de Ia vie, a sa fragileconscience.confronter, poetiquement, au gigantisme de Ia realite.Sans le moindre conflit, ces deux mondes cohabitent etse completent. L'esprit entreprend des fouilles et revelece qu'il ne faut fondamentalement pas oublier. Le createurlui donne l'espace et Ia forme, le materiau antique etpourtant novateur se surprend, par Ia force du souvenir,a faire acte de sculpture. De cette ceuvre labyrinthiquedont Ia mise en scene distinctive reconstitue Iatopographie enterree et apparente de forteresses envoie d'edification, ou de perdition, l'homme semble absent,mais son ame en aucun cas n'a disparu; il paraltseulement avoir delaisse pour un temps ce chantier,avoir abandonne ce lieu, pour se consacrer a un autre,plus prolifique. Des espaces silencieux surgissent destenebres, emergent de leurs racines, et le concepteurfait toujours corps avec Ia terre dont il est issu. Cetteterre, providentielle et feconde, reproduit desormais Iavie de ces ruines depeuplees pour donner naissance,au travers des souvenirs, a l'esprit et sa suggestiverepresentation.Au seuil d'une aube nouvelle, Charles Simonds nousentralne, avec une terre eperdument recherchee, areconsiderer le temps et lui donner, en le redecomposant,une nouvelle tension et substance, pour lui attribuerune realite maintenant definissable, mais toujoursinsaisissable. Celle-ci envahit ainsi, par une autre dimensionet par une autre representation , une sculpture forteet differenciee. J.-L. P.Mais les symboles, les souvenirs, les etres, temoignentd'un univers plus docile et l'infiniment petit atteste dureve enfin apprivoise qui peut des lors, et sans crainte, se22