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Les conseils de prud’hommes entre défense syndicale et action publique

04-44-RF

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Toute l'histoire <strong>de</strong> l'institutionnalisation <strong>de</strong>s prud'hommes montre que l'on n'a pas choisi <strong>entre</strong>plusieurs voies : celle <strong>de</strong> la constitution d'une juridiction, adossée au champ juridique <strong>et</strong> doncprise dans les logiques <strong>et</strong> les contraintes <strong>de</strong> la justice <strong>et</strong> <strong>de</strong> ses règles ; celle <strong>de</strong> la constitutiond'une institution sociale, autrement dit d'un lieu syndical, d'un lieu du paritarisme, d'un lieu <strong>de</strong>la confrontation sociale ou du dialogue social (selon les époques) ; ou encore celle d’uneinstance <strong>de</strong> négociation <strong>entre</strong> <strong>de</strong>s représentants d’intérêts socioéconomiques.Ce sont donc plusieurs modèles institutionnels qui sont disponibles pour les conseillers <strong>et</strong> quifont <strong>de</strong>s prud'hommes c<strong>et</strong>te institution-frontière, à la légitimité complexe : empruntant <strong>de</strong>sreprésentations <strong>et</strong> <strong>de</strong>s logiques à la fois au champ judiciaire <strong>et</strong> au champ syndical, au champéconomique <strong>de</strong> l’<strong>entre</strong>prise <strong>et</strong> au champ politique <strong>de</strong> la représentation <strong>de</strong>s intérêts. Elle nerelève ni vraiment <strong>de</strong> l'un, ni vraiment <strong>de</strong> l'autre. <strong>Les</strong> acteurs institutionnels (les ministères <strong>et</strong>organisations <strong>syndicale</strong>s <strong>et</strong> professionnelles) ont les plus gran<strong>de</strong>s difficultés à donner un sensvéritable aux prud'hommes. Mais loin <strong>de</strong> constituer une faiblesse, c<strong>et</strong>te pluralité <strong>de</strong>sdéfinitions possibles fait aussi sa force, non sans difficultés.L’objectif <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te partie est <strong>de</strong> revenir sur les différents moments clef <strong>de</strong> l’histoire <strong>de</strong>s<strong>prud’hommes</strong> qui continuent <strong>de</strong> travailler encore l’institution <strong>et</strong> qui en ont fait une institutionambivalente, empruntant à une pluralité <strong>de</strong> registre : instrument <strong>de</strong> régulation économique,instrument d’émancipation <strong>de</strong> la classe ouvrière, instance <strong>de</strong> représentation d’intérêts,juridiction. En 1979, c’est la coexistence <strong>de</strong> ces différentes logiques qui tend à s’imposer auxdifférents acteurs <strong>de</strong> la prud’homie : l’Etat, les organisations <strong>syndicale</strong>s <strong>et</strong> professionnelles <strong>et</strong>les conseillers eux-mêmes. En analysant ainsi la manière dont l’institution s'est créée, nouspourrons alors nous « intéresser à ce qui, en elle, est durablement objectivé, notamment sespratiques, ses savoirs <strong>et</strong> ses rôles » 5 <strong>et</strong> ce, à différentes échelles d’observations, c’est-à-direaussi bien au niveau <strong>de</strong> l’Etat, <strong>de</strong>s organisations <strong>syndicale</strong>s <strong>et</strong> professionnelles que <strong>de</strong>s<strong>conseils</strong> <strong>de</strong> <strong>prud’hommes</strong>.En replaçant l’institution prud’homale dans un mouvement séculaire nous m<strong>et</strong>trons enévi<strong>de</strong>nce la pluralité <strong>de</strong>s logiques qui ont été sédimentée dans les réformes successives <strong>de</strong>s<strong>prud’hommes</strong> (chapitre 1). Nous analyserons ensuite la manière dont les organisations<strong>syndicale</strong>s <strong>et</strong> professionnelles investissent les <strong>prud’hommes</strong> comme lieu <strong>de</strong> représentation <strong>et</strong><strong>de</strong> <strong>défense</strong> d’intérêts sociaux (chapitre 2) tout en perm<strong>et</strong>tant sa judiciarisation, ce qui n’est passans conséquence pour les conseillers eux-mêmes <strong>et</strong> les relations que les CPH <strong>entre</strong>tiennentavec l’ordre judiciaire (chapitre 3). C’est bien une institution à la frontière du champ syndical,du champ juridique <strong>et</strong> du mon<strong>de</strong> du travail qui est mise en place même si ces trois dimensionstentent à être réduite à une opposition <strong>entre</strong> syndicalisme <strong>et</strong> juridisme.5 Jacques Lagroye, La vérité dans l'église catholique, Paris, Belin, 2006, p. 19.9

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