collège <strong>et</strong> contre laquelle on peut se positionner. Encore faut-il qu’un sein du collège, c<strong>et</strong>tei<strong>de</strong>ntité soit partagée.b) Représenter ses pairsC’est donc dans l’affrontement ou, du moins dans la confrontation, que se constituent ces<strong>de</strong>ux i<strong>de</strong>ntités <strong>de</strong> collège. <strong>Les</strong> conseillers savent ce qu’ils doivent combattre ou contre quoi ilspeuvent se mobiliser. Toutefois, il leur faut encore se faire représentant <strong>de</strong> ce collège, c’est-àdireporte-parole <strong>de</strong>s employeurs ou <strong>de</strong>s salariés. <strong>Les</strong> organisations <strong>syndicale</strong>s préten<strong>de</strong>nt à c<strong>et</strong>ravail <strong>de</strong> représentation dans un mouvement d’universalisation, mais selon <strong>de</strong>s conceptionsdiverses, aussi bien du côté <strong>de</strong>s salariés que du côté <strong>de</strong>s employeurs. Il est vrai que pour lesconfédérations <strong>syndicale</strong>s, les différences sont plus visibles que pour les organisationspatronales qui font liste commune lors <strong>de</strong>s élections prud’homales. Pour les responsablespatronaux par exemple, il n’est alors pas toujours facile <strong>de</strong> faire valoir une spécificité <strong>de</strong> leurorganisation <strong>et</strong> l’explication <strong>de</strong> la différence relève souvent <strong>de</strong> la tautologie, comme pour cereprésentant <strong>de</strong> la CGPME : « la CGPME c’est la CGPME, le Me<strong>de</strong>f c’est le Me<strong>de</strong>f. Voyez ceque je veux dire ? Donc il y a <strong>de</strong>s gens qui sont pur CGPME <strong>et</strong> qui n’iront pas à <strong>de</strong>s cours duMe<strong>de</strong>f, c’est tout ! » 131 .Là où les différences apparaissent le plus clairement <strong>et</strong> ce, au risque <strong>de</strong> rem<strong>et</strong>tre en questionl’unité sinon la cohésion du collège, c’est lorsque apparaît une liste concurrente menée par lesemployeurs <strong>de</strong> l’économie sociale. Dans c<strong>et</strong>te concurrence électorale, se joue une concurrencepour la représentation <strong>de</strong>s employeurs comme le rappelle le prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> l’USGERES,organisation très engagée dans ce combat pour la représentativité <strong>de</strong>s employeurs <strong>de</strong>l’économie sociale :« Nous, nous nous revendiquons d’une gestion peut-être à caractère plus sociale, mais là, à titrepersonnel, je pense que nous n’avons pas le monopole du cœur <strong>et</strong> que <strong>de</strong>s <strong>entre</strong>prises du secteurprivé ont une politique sociale qui est au moins aussi élaborée que celle <strong>de</strong> certaines <strong>entre</strong>prisesdu tiers secteur, du secteur <strong>de</strong> l’économie non marchan<strong>de</strong>. Il y a <strong>de</strong>s <strong>entre</strong>prises qui marchentbien <strong>et</strong> <strong>de</strong>s dirigeants qui ont une conception assez ouverte <strong>et</strong> ne visent pas que le profit àoutrance <strong>et</strong> qui ont bien compris que ce n’était pas le seul critère. Donc on ne veut pas tomberdans la caricature du vilain patron du secteur marchand qui est méchant avec les salariés <strong>et</strong> lespatrons vertueux qui sont ceux <strong>de</strong> l’économie sociale. » 132Pour les responsables du MEDEF, au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong> la concurrence directe avec ces organisations <strong>de</strong>l’économie sociale, il s’agit d’une conception du patronat <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’<strong>entre</strong>prise qui serait erronée<strong>et</strong> qui démontreraient combien ces employeurs ne sont pas <strong>de</strong> « vrais employeurs » :« On a beaucoup <strong>de</strong> prési<strong>de</strong>nt d’associations qui sont d’anciens salariés <strong>et</strong> qui ont pas forcémentun comportement d’employeur… d’<strong>entre</strong>preneur… <strong>de</strong>… donc qui seraient peut-être plus tentés<strong>de</strong> réagir en salariés. (…) Et puis on en a aussi qui sont affiliés à les syndicats <strong>de</strong> salariés. Çaaussi c’est un problème. On peut très bien être prési<strong>de</strong>nt d’une association, être dans le collègeemployeur <strong>et</strong> puis être affilié à la CGT ou à la CFDT <strong>et</strong> tout ça. Et donc pour nous c’est quandmême problématique quand on a en face… quand on a dans notre collège ce type <strong>de</strong>… <strong>de</strong>…conseiller <strong>prud’hommes</strong>. » 133De leur côté, les responsables <strong>de</strong>s syndicats <strong>de</strong> l’économie sociale, conscient <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te imagequi les désert, savent qu’ils doivent convaincre à la fois leurs interlocuteurs qu’ils ne sont pasforcément <strong>de</strong> gauche ou encore qu’ils ne sont pas forcément du côté <strong>de</strong>s salariés, <strong>et</strong> leurs131Entr<strong>et</strong>ien n°Z05132Entr<strong>et</strong>ien n°Z04133Entr<strong>et</strong>ien n°Z0648
membres qui auraient tendance à avoir <strong>de</strong>s comportements douteux quant à c<strong>et</strong>te i<strong>de</strong>ntité <strong>de</strong>patron revendiquée. Aux <strong>prud’hommes</strong>, ils peuvent s’appuyer sur la structure paritaire pour« faire prendre conscience aux prési<strong>de</strong>nts d’associations qu’ils sont quand mêmeemployeurs ». Comme le rappelle ce dirigeant, c’est « un <strong>de</strong>s chantiers principaux » :« Dans les secteurs notamment associatifs (…) généralement ce sont <strong>de</strong>s gens qui sont <strong>de</strong>smilitants, parfois qui sont dans <strong>de</strong>s syndicats <strong>de</strong> salariés… qui sont <strong>de</strong>s militants syndicalistessalariés mais dès lors qu’ils ont <strong>de</strong>s salariés ils <strong>de</strong>viennent employeurs. Alors le mot patronat faitpeur, rebute un p<strong>et</strong>it peu, mais (…) je crois qu’il est plus sage <strong>de</strong> ne pas refuser le mot <strong>et</strong> en fait<strong>de</strong> dire ‘patronat’ en précisant ‘<strong>de</strong> l’économie sociale’ pour nous démarquer, en quelque sorte, dupatronat traditionnel du secteur marchand représenté essentiellement par le Me<strong>de</strong>f mais pas quepar le Me<strong>de</strong>f. » 134En <strong>de</strong>venant élus au Conseil <strong>de</strong> <strong>prud’hommes</strong>, ces conseillers peuvent <strong>de</strong>venir <strong>de</strong> « vrais »employeurs, ce serait-ce que parce qu’ils sont face aux conseillers salariés qui non seulementattend d’eux un comportement <strong>de</strong> patron mais aussi leur renvoie une image du patronat qu’ilspeuvent saisir ou refuser mais qui, dans tous les cas, s’impose à eux.A observer ainsi comment, dans le cas <strong>de</strong>s employeurs <strong>de</strong> l’économie sociale, se constitue unei<strong>de</strong>ntité patronale, on comprend comment les conseillers élus peuvent se faire patrons au-<strong>de</strong>là<strong>de</strong> la diversité <strong>de</strong> leurs conditions économiques <strong>et</strong> <strong>de</strong> leurs statuts dans l’<strong>entre</strong>prise. Pourbeaucoup <strong>de</strong> conseillers en eff<strong>et</strong>, le collège <strong>de</strong>s employeurs ou <strong>de</strong>s salariés apparaît commehomogène. C’est le cas pour ce prési<strong>de</strong>nt employeur d’un p<strong>et</strong>it CPH du Nord <strong>de</strong> la France :« Le collège employeur est assez homogène. Ce sont <strong>de</strong>s gens responsables, <strong>de</strong>s gens qui ont uneculture pour un certain nombre bourgeoise, pour un autre nombre une culture <strong>de</strong> techniciens,d'ouvriers qui sont sortis du rang, mais c'est une culture assez homogène. Le patron qui juge auxprud'hommes, c'est quand même <strong>de</strong>s gens qui sont, qui ont une équité, ça c'est sûr, qui sont làpour... Parce qu'ils ont une vision <strong>de</strong> la société industrielle mais qui ne sont pas forcémentanimés d'idées politiques versatiles ou d'idées politiques à régler <strong>de</strong>s comptes. Ils sont plus làpour une certaine équité, pour une certaine justice <strong>de</strong> la société industrielle. J'en suis convaincu.Même s'il y a <strong>de</strong>s p<strong>et</strong>ites exceptions. Le problème du collège salarié est un peu plus compliqué :vous avez plusieurs syndicats dont les étiqu<strong>et</strong>tes malheureusement en France ont une certain<strong>et</strong>einte politique. » 135S’il est vrai que l’ensemble <strong>de</strong>s conseillers partage une certaine culture commune <strong>et</strong> qu’ilsparticipent <strong>de</strong> la cohésion du collège, il n’empêche que c<strong>et</strong>te homogénéité est le résultat d’unprocessus <strong>de</strong> socialisation qui s’effectue à la fois au sein du CPH grâce au travail <strong>de</strong>d’imposition <strong>de</strong> rôle au sein d’un collège <strong>et</strong> au sein <strong>de</strong>s organisations <strong>syndicale</strong>s <strong>et</strong>professionnelles.3. Des « juges militants » : un rôle ambigu ?Ces i<strong>de</strong>ntités sociales – celle du « patron » ou du « salarié » – perm<strong>et</strong>tent <strong>de</strong> faire tenirensemble <strong>de</strong>s individus hétérogènes aussi bien par leur statut <strong>et</strong> leur activité professionnelleque par la taille <strong>et</strong> la nature <strong>de</strong> l’<strong>entre</strong>prise qu’ils dirigent ou dans laquelle ils travaillent.I<strong>de</strong>ntifiés à un collège, les conseillers sont peu à peu pris dans une logique <strong>de</strong> représentation<strong>et</strong> <strong>de</strong> <strong>défense</strong> <strong>de</strong>s intérêts <strong>de</strong> ce collège. Un tel enrôlement militant ne va toutefois pas <strong>de</strong> soi.Certes, il est plus facile pour les conseillers qui ont déjà <strong>de</strong>rrière eux une carrière <strong>syndicale</strong>.Leur organisation leur a en eff<strong>et</strong> déjà permis <strong>de</strong> structurer un certain nombre <strong>de</strong> discours <strong>et</strong> <strong>de</strong>134Entr<strong>et</strong>ien n°Z 04135Entr<strong>et</strong>ien n°C0849
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