informelles à la Direction <strong>de</strong>s relations du travail, chaque organisation <strong>syndicale</strong> <strong>et</strong>professionnelle se voit érigée au rang <strong>de</strong> partenaire national. Certes, c<strong>et</strong>te représentation estlimitée au secteur <strong>de</strong> la prud’homie <strong>et</strong> n’entend nullement se substituer à ce qui se m<strong>et</strong> enplace dans d’autres secteurs. Mais elle a une double conséquence. D’une part, ce systèmeinvite chacune <strong>de</strong>s organisations <strong>syndicale</strong>s <strong>et</strong> professionnelles à prendre en compte ladimension prud’homale dans sa politique <strong>syndicale</strong>. Si certaines, comme la CGT ou la CFDTl’avaient déjà fait, bien qu’en l’intégrant dans une stratégie juridique plus large <strong>de</strong>l’organisation, pour la CGC, la CGT-FO ou encore certaines organisations patronales, c’estrelativement nouveau. La désignation d’un porte-parole au sein du Conseil supérieur <strong>de</strong> laprud’homie n’est qu’un indicateur <strong>de</strong> l’objectivation <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’autonomisation d’une politiqueprud’homale au sein <strong>de</strong>s organisations, mais elle oblige chaque confédération à s’intéresseraux <strong>prud’hommes</strong> en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong>s seuls moments électoraux. Ils sont ainsi tenus <strong>de</strong> s’intéresserà la formation <strong>de</strong>s conseillers, aux conditions matérielles <strong>et</strong> financières du travail prud’homal<strong>et</strong> plus largement aux conséquences que peuvent avoir <strong>de</strong>s transformations du droit du travaildans l’activité <strong>de</strong>s Conseils. La consultation du Conseil supérieur <strong>de</strong> la prud’homie sur laréforme <strong>de</strong> 1986 relative à la suppression <strong>de</strong> l’autorisation administrative <strong>de</strong> licenciement enest un bon exemple. Même s’il n’y a pas <strong>de</strong> politique prud’homale pour toutes lesorganisations, il y a toutefois une réflexion sur l’articulation <strong>de</strong>s <strong>prud’hommes</strong> avec d’autresdimensions <strong>de</strong> l’<strong>action</strong> <strong>syndicale</strong> <strong>et</strong> <strong>de</strong> ses mo<strong>de</strong>s d’intervention.D’autre part, c<strong>et</strong>te institutionnalisation nationale <strong>de</strong> la négociation en matière prud’homalecontribue à renforcer la logique <strong>syndicale</strong> <strong>de</strong>s <strong>prud’hommes</strong> <strong>et</strong> à la substituer à une logiqueprofessionnelle qui pouvait exister au sein <strong>de</strong>s sections. En eff<strong>et</strong>, il n’y a pas <strong>de</strong> représentation<strong>de</strong> chacune <strong>de</strong>s sections <strong>et</strong> les porte-parole s’expriment en termes généraux sur chacuned’<strong>entre</strong> elle, au risque <strong>de</strong> leur faire perdre toute spécificité, pour autant qu’elles n’en aientjamais eu. Même la section <strong>de</strong> l’encadrement perd <strong>de</strong> sa spécificité au profit d’unestructuration <strong>de</strong>s débats par organisation <strong>syndicale</strong>, toute section confondue. On est bien dansl’ordre <strong>de</strong> l’interprofessionnel. Au Conseil supérieur <strong>de</strong> la prud’homie seule la logique <strong>de</strong>scollèges est préservée à travers l’expression <strong>de</strong> chaque organisation <strong>syndicale</strong> <strong>et</strong>professionnelle. Se m<strong>et</strong> alors en place une forme <strong>de</strong> correspondance <strong>entre</strong> la structure paritaire<strong>de</strong>s Conseils <strong>de</strong> <strong>prud’hommes</strong> <strong>et</strong> un paritarisme au niveau national qui se règle peu à peu surles relations que l’Etat <strong>entre</strong>tient avec les partenaires sociaux. Ainsi, les <strong>prud’hommes</strong> sontintégrés à la politique <strong>syndicale</strong> dont ils <strong>de</strong>viennent peu à peu un terrain parmi d’autres <strong>de</strong>l’activité <strong>syndicale</strong>. Ainsi, les <strong>prud’hommes</strong> sont fortement dépendants <strong>de</strong> ces logiques<strong>syndicale</strong>s à tel point qu’ils ne peuvent plus être pensés en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> ces schèmes <strong>de</strong>perception. De ce fait, alors qu’ils étaient conçus comme un terrain <strong>de</strong> l’expérimentation <strong>de</strong> lanégociation <strong>entre</strong> partenaires sociaux au niveau <strong>de</strong> l’<strong>entre</strong>prise, ils ten<strong>de</strong>nt à s’autonomiser dumon<strong>de</strong> du travail au profit <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te intégration <strong>syndicale</strong>, comme si toute <strong>action</strong> dans le mon<strong>de</strong>du travail <strong>de</strong>vait nécessairement passer par la voie du syndicalisme. La dimensionprofessionnelle <strong>de</strong>s <strong>prud’hommes</strong>, au sens où il s’agirait d’employeurs <strong>et</strong> <strong>de</strong> salariés réglantensemble les différends au travail, tend à être dissoute dans la dimension <strong>syndicale</strong> <strong>de</strong>s<strong>prud’hommes</strong>.On comprend alors qu’à l’issue <strong>de</strong> la réforme <strong>de</strong> 1979, les <strong>prud’hommes</strong> se sont plus conçusqu’à travers une alternative <strong>entre</strong> syndicalisme <strong>et</strong> juridisme qui structure encore très fortementles politiques <strong>de</strong>s organisations <strong>syndicale</strong>s <strong>et</strong> professionnelles <strong>et</strong> se r<strong>et</strong>rouvent, à <strong>de</strong>s <strong>de</strong>grédivers selon leur proximité au syndicalisme, chez les conseillers qui se trouvent pris <strong>entre</strong><strong>de</strong>ux logiques inconciliables : d’un côté, une logique judiciaire où le conseiller doit juger endroit <strong>et</strong> se conformer aux injonctions <strong>de</strong> l’ordre judiciaire, <strong>de</strong> l’autre, une logique <strong>syndicale</strong> où<strong>de</strong>s militants élus vont défendre les intérêts <strong>de</strong>s salariés ou <strong>de</strong>s employeurs. C<strong>et</strong>te ambivalence34
<strong>de</strong> l’institution, mise en évi<strong>de</strong>nce par les observateurs à la fin <strong>de</strong>s années 1970 <strong>et</strong> sur les« nouveaux <strong>prud’hommes</strong> » 96 , n’est que le résultat <strong>de</strong> ce double mouvementd’institutionnalisation <strong>de</strong> la prud’homie dans la politique <strong>syndicale</strong> <strong>et</strong> <strong>de</strong>s organisations<strong>syndicale</strong>s <strong>et</strong> professionnelles dans la gestion <strong>de</strong> la prud’homie. Mais il s’agit d’uneconception qui en reste pour l’essentiel à un niveau national. Si la dimension professionnellese trouve ainsi écrasé par la dimension <strong>syndicale</strong>, ce n’est qu’au niveau national où lesreprésentants <strong>de</strong>s confédérations ont le monopole <strong>de</strong>s discours sur les <strong>prud’hommes</strong>. Dès lorsque l’on observe les conseillers <strong>prud’hommes</strong> dans les Conseils <strong>et</strong> leurs pratiques, on se rendcompte que leur i<strong>de</strong>ntité <strong>et</strong> leur pratique ne peuvent se réduire à une i<strong>de</strong>ntité <strong>et</strong> <strong>de</strong>s pratiques<strong>syndicale</strong>s 97 .Le moment <strong>de</strong> la réforme <strong>de</strong> 1979 est donc un moment <strong>de</strong> pérennisation <strong>de</strong> l’institution quis’effectue à travers un double mouvement <strong>de</strong> judiciarisation <strong>et</strong> <strong>de</strong> syndicalisation <strong>de</strong> lajuridiction. L’accroissement <strong>de</strong> l’un, ne se soldant pas par une diminution <strong>de</strong> l’autre mais serenforce mutuellement. Pour les acteurs nationaux <strong>de</strong> la prud’homie, une telle réforme donneun cadre légitime à la dimension juridique <strong>de</strong> leur <strong>action</strong> <strong>syndicale</strong> <strong>et</strong> accentue la dimension<strong>syndicale</strong> au sein <strong>de</strong>s <strong>conseils</strong> <strong>de</strong> <strong>prud’hommes</strong>. Mais dans le même temps, le contenu <strong>de</strong> laréforme Boulin perm<strong>et</strong> <strong>de</strong> préserver la pluralité <strong>de</strong>s définitions <strong>de</strong>s <strong>prud’hommes</strong> : ils restenten eff<strong>et</strong> à la fois une juridiction, un lieu <strong>de</strong> négociation <strong>et</strong> une instance <strong>de</strong> représentation <strong>de</strong>sintérêts pouvant être tantôt s’i<strong>de</strong>ntifier aux forces <strong>syndicale</strong>s, comme pour le résultat <strong>de</strong>sélections, tantôt se confondre avec ceux du mon<strong>de</strong> du travail <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’<strong>entre</strong>prise.96 Cf. Bonafé-Schmitt (Jean-Pierre), « <strong>Les</strong> <strong>prud’hommes</strong> : du conseil <strong>de</strong> discipline à la juridiction <strong>de</strong> droitcommun du travail », Le Mouvement social, n°141, octobre-décembre 1987, p.131 ou cf. l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> Ann<strong>et</strong>teJobert <strong>et</strong> Patrick Rosenblatt, <strong>Les</strong> <strong>conseils</strong> <strong>de</strong> <strong>prud’hommes</strong>, rapport du CREDOC, 1978,97 Cf. Michel (Hélène) <strong>et</strong> Willemez (Laurent), « Entre activité juridique, engagement syndical <strong>et</strong> mon<strong>de</strong> dutravail : l’exercice du mandat prud'homal aujourd'hui », in Vernus (Pierre) <strong>et</strong> Robert (François), dir., Histoired'une juridiction d'exception : les prud'hommes (XIXe –XXe siècles), à paraître 200735
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