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Les conseils de prud’hommes entre défense syndicale et action publique

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plus globale <strong>de</strong> ce qui se passe dans d’autres boîtes, quoi. Et encore plus en référé. On avraiment tous les secteurs d’activité qui passent en référé » 331 . Pour lui, comme pour laplupart <strong>de</strong>s conseillers, les affaires qu’ils jugent leur donnent une connaissance à la fois plusapprofondie <strong>et</strong> plus large du mon<strong>de</strong> du travail. Mais ce mouvement <strong>de</strong> montée en généralitésemble toujours être combiné à un autre mouvement <strong>de</strong> r<strong>et</strong>our vers le concr<strong>et</strong> où lesconseillers peuvent ramener les cas à leur propre expérience. C’est ce que raconte c<strong>et</strong>teconseillère, élue <strong>de</strong>puis 2002 dans le collège salarié :« Moi je trouve que les dossiers sont intéressants, il y a toujours quelque chose... c'estpassionnant moi je trouve. (…) Déjà l'histoire. Parce que bon, il y a rarement <strong>de</strong>s histoiresi<strong>de</strong>ntiques. Bon il y a souvent <strong>de</strong>s choses qui reviennent, mais c'est vrai que c'est intéressant <strong>de</strong>voir ce qui se passe dans les <strong>entre</strong>prises. Et puis on revit aussi ce qui se passe dans la nôtre. Parceque faut pas croire, le mon<strong>de</strong> du travail, ce qui se passe dans une <strong>entre</strong>prise, souvent ça arrive tôtou tard dans une autre. <strong>Les</strong> mentalités... Il y a très peu d'<strong>entre</strong>prises maintenant où tout le mon<strong>de</strong>il est beau tout le mon<strong>de</strong> il est gentil, j'en connais pas beaucoup. » 332Leur expérience professionnelle leur perm<strong>et</strong> <strong>de</strong> faire abstr<strong>action</strong> <strong>et</strong> en même temps <strong>de</strong>réencastrer les cas dans un ensemble <strong>de</strong> relations concrètes <strong>et</strong> <strong>de</strong> saisir les parties dans leursconditions <strong>de</strong> travail. Et c’est bien ce double mouvement qui est prisé dans l’activité <strong>de</strong>jugement lorsque les conseillers rappellent l’importance d’être issus du mon<strong>de</strong> professionnel.Du coup, ce ne sont pas tant les éléments concr<strong>et</strong>s d’un métier qui sont convoqués, dans lamesure où il reste rare que les conseillers aient à apprécier <strong>de</strong>s affaires relevant <strong>de</strong> leur propremétier, mais plus largement les éléments concr<strong>et</strong>s <strong>de</strong>s relations <strong>entre</strong> employeurs <strong>et</strong> salariéspris dans un ensemble <strong>de</strong> contraintes socio-économiques. <strong>Les</strong> récits qui m<strong>et</strong>tent en avant laconnaissance <strong>de</strong> l’<strong>entre</strong>prise, outre les éléments concr<strong>et</strong>s concernant le travail sur un tour, surune machine <strong>de</strong> découpe <strong>de</strong>s pièces, rappellent surtout la nature <strong>de</strong>s relations <strong>entre</strong>employeurs <strong>et</strong> salariés : « on sait ce qu'est une hiérarchie, on sait ce que c'est une pointeuse,on sait ce que c'est <strong>de</strong>s objectifs, on sait que c'est que d'avoir une voiture <strong>de</strong> service <strong>et</strong> puisd'aller baguenau<strong>de</strong>r en campagne. On sait tout ça alors qu'un magistrat il sait pas forcément.On sait ce que c'est <strong>de</strong>s rapports d'<strong>entre</strong>prise. » 333 C’est sur ces rapports d’<strong>entre</strong>prise que lesconseillers évaluent les affaires. Ils se posent alors sages <strong>de</strong>s relations sociales dont ils saventapprécier la bonne forme <strong>et</strong> dont ils se font les <strong>défense</strong>urs au sein même du Conseil.Lors <strong>de</strong>s audiences, ce souci <strong>de</strong>s bonnes relations est assez visible. D’une part lorsqu’il s’agit<strong>de</strong> « dépassionner le débat ». Ils expliquent comment il est important d’écouter <strong>de</strong> manièreégale les <strong>de</strong>ux parties :« En règle général on les écoute chacun à leur tour, moi ce que j’essaie <strong>de</strong> faire souvent c’estd’éviter que le <strong>de</strong>man<strong>de</strong>ur <strong>et</strong> le <strong>défense</strong>ur discutent <strong>entre</strong> eux. Il y a certaines rivalités <strong>entre</strong> lesuns <strong>et</strong> les autres <strong>et</strong> on essaie justement <strong>de</strong>… d’éviter ces regards assassins qu’ils ont l’un enversl’autre donc… On fait bien en sorte qu’ils nous parlent à nous <strong>et</strong> pas à… <strong>et</strong> pas à leur ennemijuré. On essaie <strong>de</strong> dépassionner un peu, d’avoir un ton qui soit correct. Souvent le ton est assez…assez… assez sur la défensive donc il faut essayer <strong>de</strong> baisser le ton » 334Ils rappellent aussi comment dans ces audiences, il leur appartient <strong>de</strong> rééquilibrer les relations<strong>de</strong> manière aussi à redonner confiance à l’une <strong>de</strong>s parties, qu’il s’agisse du p<strong>et</strong>it <strong>entre</strong>preneurqui n’a pas les moyens <strong>de</strong> verser les in<strong>de</strong>mnités <strong>de</strong> licenciements ou du salarié qui n’a pasencore reçu son attestation <strong>de</strong> licenciement pour pouvoir toucher les Assedic. Redonner unecertaine dignité aux parties fait pleinement partie <strong>de</strong> leur rôle, surtout dans les audiences <strong>de</strong>référé où il s’agit non seulement d’urgence, mais aussi <strong>de</strong> cas dramatiques :331Entr<strong>et</strong>ien n°F13.332Entr<strong>et</strong>ien n°F16.333Entr<strong>et</strong>ien n°J03.334Entr<strong>et</strong>ien n°F05.161

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