journal of european integration history revue d'histoire de l ...

78
Catherine Previti Allaire
Pour lors, le petit Emile mène une vie modeste et retirée aux côtés de ses jeunes
sœur et frère, tandis que leur mère leur inculque une éducation poussée. Vers l’âge
de douze ans seulement, il est scolarisé au lycée catholique d’Aix-en-Provence où
ont déménagé ses parents. A cette période décède son père, souffrant de longue
date. 3 Malgré les difficultés économiques, il obtient son baccalauréat à seize ans
puis fréquente les classes préparatoires de mathématiques à Montpellier puis à
Marseille. Il poursuit sa formation à Paris dans la section scientifique de l’Ecole
normale supérieure (promotion 1941) avant d’obtenir les licences de sciences
physiques et mathématiques à l'université (1942-1943).
La guerre interrompt ses études. Son engagement dans la Résistance, 4 initié dès 1941 à
Aix-en-Provence, se poursuit dans les locaux de la montagne Sainte-Geneviève. Il participe
à la diffusion du journal “Résistance” et à l’organisation de départs pour le maquis avant de
se rendre lui-même, en juin 1943, en Isère. Après l’attaque et la dissolution de son groupe, il
intègre dès le mois suivant un groupe vauclusien qui procède à des récupérations (essence,
équipements des Chantiers de jeunesse …). C’est là qu’opère Georges Rebattet qui a quitté
en novembre 1942 les fonctions de second-maître des Compagnons de France pour mieux
diriger les maquis des Mouvements unis de résistance. De retour à Paris, en décembre,
Emile Noël reprend sa collaboration avec l’organisation Résistance dans laquelle il s'occupe
de l’impression clandestine, de l’aide aux réfractaires, du service faux papiers, des
renseignements, des évacuations vers le maquis et des contacts avec la résistance locale.
L’arrestation et la déportation de ses principaux animateurs en juin 1944 marquent la fin
tragique du réseau. Emile Noël se tourne alors vers la réorganisation du Mouvement de
libération nationale dans la région parisienne.
2. Compagnon et cam’lib’
Durant le conflit, l’étudiant adhère également au mouvement Compagnon qui finit
par s’entrecroiser avec la Résistance. Cette association, fondée en juillet 1940 au
lendemain de la défaite française, est placée sous l'égide du ministère de la Famille
et de la Jeunesse. Elle vise «le rassemblement de jeunes Français désireux de participer
au relèvement matériel et moral de leur pays […] en offrant leur concours
[…] (à) toutes initiatives propres à associer les jeunes au service du pays». 5
Ouverte à des adhérents de toute sensibilité politique et religieuse, elle est le promoteur
d'une déclaration commune des mouvements de jeunesse:
3. Ces informations sont tirées de l’intervention de la fille d’E. Noël, M. NOËL-BAUER, au colloque
sur E. Noël organisé par le Jean-Monnet-Arbeitskreis Nordrhein-Westfalen à Bonn les 25-26/09/
1998. Voir également la contribution de D. LEFEBVRE, Emile Noël, le très discret Européen, in:
Le bulletin du centre Guy Mollet, n°28, 12/1996.
4. Cf. curriculum vitae rédigé par E. Noël en 06/1945.
5. Statut des Compagnons de France. Cf. notamment les interventions de B. COMTE et M.-S.
BRIANCEAU, Table ronde sur les Compagnons de France, M. Deltombe, Paris, 1991. Cette
manifestation fut organisée le 14/12/1990 par le professeur M. Vaïsse à l’Institut de France dans le
cadre de l'Institut d'histoire des relations internationales. La déclaration commune des
Compagnons est professée dans la forêt de Randan (Allier) en août 1940.