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116 Book reviews – Comptes rendus – Buchbesprechungen Ceci conduit l’auteur à plusieurs imprécisions – relatives notamment à l’organisation avortée d’un deuxième Congrès paneuropéen à Bruxelles en octobre 1927, puis à Paris en octobre 1928 (pp.152-154) – et à des erreurs d’analyse – concernant, par exemple, l’aspect économique de l’action du Comte dans les années qui suivent le Premier Congrès Paneuropéen de Vienne en octobre 1926. Dans une troisième et dernière partie, Anne-Marie Saint-Gille évoque la réception des idées paneuropéennes dans divers milieux intellectuels – politiques et littéraires – germanophones. Des différents débats qui naissent alors surgit une réflexion multiforme sur les fondements culturels de la civilisation européenne, sur l’identité européenne (Europe et Occident, modernité politique et européisme) et sur le sens même de la crise que traverse l’Europe d’entre-deux-guerres. Particulièrement dense, cette troisième partie, dans laquelle l’auteur privilégie une démarche thématique, dresse un tableau intellectuel d’une très grande richesse, évoquant les points communs mais surtout les différences entre Richard Coudenhove-Kalergi et les intellectuels allemands tels que Wilhelm Heile, Karl Anton von Rohan, Thomas Mann, Klaus Mann, etc. L’ouvrage d’Anne-Marie Saint-Gille, s’il accuse certaines faiblesses dans la seconde partie, contribue très certainement à «recadrer» la figure du comte Coudenhove-Kalergi et de son mouvement qui – bien qu’il ne soit pas parvenu à l’idéal qu’il s’était fixé, n’en demeure pas moins essentiel pour l’histoire de l’idée d’Europe unie. Geneviève Duchenne Institut d’études européennes, Université catholique de Louvain Catherine GUISAN – Un sens à l’Europe. Gagner la paix (1950-2003), Odile Jacob, Paris, 2003, 291 p. – ISBN 2-7381-1356-7 – 27,5 €. Dans l’historiographie de la construction européenne, comme partout, la tendance, en dehors des cercles initiés, est à la renationalisation. Beaucoup d’ouvrages de ces dernières années tentent à expliquer l’unification européenne uniquement ou presque par de multiples combinaison des intérêts nationaux (p.ex. Gerhard Brunn, Die europäische Einigung von 1945 bis heute, Stuttgart, 2002) ou par des conjugaisons d’intérêts économiques (p.ex. John Gillingham, Superstate or New Market Economy? European integration 1950-2003, Cambridge, 2003). Rares sont ceux qui prennent au sérieux soit le caractère trans- et supranational de la construction européenne (comme p.ex. Johnny Laursen, Towards a Supranational History?, Journal of European Integration History, 1(2002), pp. 5-10), soit les idées, convictions, motifs et visions des acteurs: C’est justement l’approche de Catherine Guisan qui oppose ainsi, sans se référer au débat théorique, aux interprétations «réalistes» de la construction européenne une histoire «constructiviste». En effet, ce n’est qu’ainsi que l’on peut rendre à l’œuvre européen son «sens» – en le retrouvant là où il a été conçu, à la source, à l’esprit des pères fondateurs et de leurs successeurs, jusqu’aux conventionnels des années 2002/03. Catherine Guisan identifie quatre «principes d’action» qui ont inspiré et guidé les acteurs: la réconciliation, l’action concertée-puissance, la reconnaissance de l’autre, le parler vrai et juste, quatre principes qui ont donné des impulsions décisives à la construction européenne. Elle les subdivise en «pratiques» afin d’opérationnaliser ces critères, à l'instar, p.ex., de la réconciliation: ce principe implique d’assumer une part de responsabilité pour le mal fait; implique la disposition de pardonner; une promesse, un projet d’avenir; une organisation matérielle de la solidarité; suppose que ce processus sensible se passe sous l’égide d’une puissance extérieure, un «ange gardien» (les Etats-Unis dans les premiers pas de la construction européenne). C’est par ces moyens que l’auteur échappe à la gratuité
Book reviews – Comptes rendus – Buchbesprechungen 117 d’une simple analyse des belles convictions des acteurs et arrive à jeter le pont entre les idées et les réalisations politiques, économiques et sociales. Tout en restant fidèle á la méthode du récit historique – elle parle du «fablier» de la construction européenne -, Catherine Guisan est hautement consciente des fondements théoriques de son approche. Tour à tour, elle relie les principes d’actions qu’elle retrouve dans ses sources historiques à des considérations théoriques de Hannah Arendt, de Juergen Habermas, de Charles Taylor et d’autres encore. Le tandem conceptuel de «pardon et de promesse» par exemple est emprunté à Hannah Arendt et sert d’instrument d’analyse, de grille de lecture notamment des premières étapes de la création des communautés européennes, tandis que les idées de Habermas sur une démocratie basée sur une communication entre égaux, sans domination, susceptibles de faire surgir et prévaloir le meilleur argument (au lieu de l’opinion de celui qui dispose du pouvoir) sert à saisir une part de la méthode de concertation chère à Jean Monnet ou encore les délibérations de la Convention constitutionnelle. Le communautarisme de Taylor, par contre, est utilisable pour comprendre la nécessité, sinon la réalité, de la reconnaissance de l’autre, dans le sens individuel et personnel – cet autre qui était ennemi et devient partenaire -, mais aussi dans le sens politique et actuel, dans la perspective de l’élargissement qui lui aussi demande un effort de reconnaissance de l’égalité, de la dignité des peuples européens qui étaient jusqu’alors exclus de la construction européenne. Il est parfaitement conséquent, dans une telle approche, de se baser sur une masse de sources historiques composée essentiellement de mémoires, interviews, entretiens, plutôt que sur des documents diplomatiques ou des données chiffrées. Catherine Guisan a affaire à un «objet subjectif», et elle n’y accède que par des sources des sujets impliqués, des personnes concrètes, de leurs pensées. C’est ce fond de sources et leur exploitation qui rend le livre en même temps très vivant, très proche de la vie humaine, fascinant aussi par les multiples expériences personnelles qu’elle raconte – ce qui, qu’il soit dit encore une fois, n’est pas une déviation mais scientifiquement nécessaire si on choisi l’approche esquissé. En effet, Catherine Guisan réussit à relever un «trésor» (son premier chapitre est intitulé «Un trésor perdu»), dont l’Europe doit s’assurer pour faire son chemin dans l’avenir. Ce trésor n’est pas un fantasme de quelques idéalistes. Catherine Guisan met sur la table les preuves de l’impact de la pensée sur la réalité: Sans les «principes d’action», sans le pardon et la promesse, sans la reconnaissance de l’autre etc., l’Europe unifiée n’aurait pas vu le jour. Il ne suffit décidément pas d’invoquer les intérêts des Etats et les intérêts économiques pour expliquer ce phénomène. L’Union européenne, comme les européens dans leurs Etats, ont tout intérêt à se rendre à cette évidence, à l’heure de la réunification et de la constitution de l’Europe … Hartmut Marhold Directeur général du Centre international de formation européenne, Nice Martin P.C. SCHAAD – Bullying Bonn: Anglo-German Diplomacy on European Integration, 1955-61, Macmillan, London, 2000, viii + 243 p.- ISBN 0-333-69231-4. – 47,50 £. Is ‘bullying Bonn’ fair comment on British policy towards Germany about European integration in the second half of the Fifties? Martin Schaad makes a good case that it is, indeed, fair comment. He charts a rather depressing episode in Britain's attempt to come to terms with, and be part of the process of European integration. Although Schaad does not make the point, and he might have, what he is describing is the management of decline on Britain's part and the politics of rebirth on the part of Germany and the embryonic European Union. Britain has not always managed decline with grace and the EEC-EFTA debate and policy confrontation is a case in point.
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Tout en restant fidèle á la métho<strong>de</strong> du récit historique – elle parle du «fablier» <strong>de</strong> la<br />
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Habermas, <strong>de</strong> Charles Taylor et d’autres encore. Le tan<strong>de</strong>m conceptuel <strong>de</strong> «pardon et <strong>de</strong><br />
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européennes, tandis que les idées <strong>de</strong> Habermas sur une démocratie basée sur une<br />
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Convention constitutionnelle. Le communautarisme <strong>de</strong> Taylor, par contre, est utilisable pour<br />
comprendre la nécessité, sinon la réalité, <strong>de</strong> la reconnaissance <strong>de</strong> l’autre, dans le sens<br />
individuel et personnel – cet autre qui était ennemi et <strong>de</strong>vient partenaire -, mais aussi dans le<br />
sens politique et actuel, dans la perspective <strong>de</strong> l’élargissement qui lui aussi <strong>de</strong>man<strong>de</strong> un<br />
effort <strong>de</strong> reconnaissance <strong>de</strong> l’égalité, <strong>de</strong> la dignité <strong>de</strong>s peuples européens qui étaient<br />
jusqu’alors exclus <strong>de</strong> la construction européenne.<br />
Il est parfaitement conséquent, dans une telle approche, <strong>de</strong> se baser sur une masse <strong>de</strong><br />
sources historiques composée essentiellement <strong>de</strong> mémoires, interviews, entretiens, plutôt<br />
que sur <strong>de</strong>s documents diplomatiques ou <strong>de</strong>s données chiffrées. Catherine Guisan a affaire à<br />
un «objet subjectif», et elle n’y accè<strong>de</strong> que par <strong>de</strong>s sources <strong>de</strong>s sujets impliqués, <strong>de</strong>s<br />
personnes concrètes, <strong>de</strong> leurs pensées. C’est ce fond <strong>de</strong> sources et leur exploitation qui rend<br />
le livre en même temps très vivant, très proche <strong>de</strong> la vie humaine, fascinant aussi par les<br />
multiples expériences personnelles qu’elle raconte – ce qui, qu’il soit dit encore une fois,<br />
n’est pas une déviation mais scientifiquement nécessaire si on choisi l’approche esquissé.<br />
En effet, Catherine Guisan réussit à relever un «trésor» (son premier chapitre est intitulé «Un<br />
trésor perdu»), dont l’Europe doit s’assurer pour faire son chemin dans l’avenir. Ce trésor n’est<br />
pas un fantasme <strong>de</strong> quelques idéalistes. Catherine Guisan met sur la table les preuves <strong>de</strong> l’impact<br />
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reconnaissance <strong>de</strong> l’autre etc., l’Europe unifiée n’aurait pas vu le jour. Il ne suffit décidément pas<br />
d’invoquer les intérêts <strong>de</strong>s Etats et les intérêts économiques pour expliquer ce phénomène.<br />
L’Union européenne, comme les européens dans leurs Etats, ont tout intérêt à se rendre à cette<br />
évi<strong>de</strong>nce, à l’heure <strong>de</strong> la réunification et <strong>de</strong> la constitution <strong>de</strong> l’Europe …<br />
Hartmut Marhold<br />
Directeur général du Centre international <strong>de</strong> formation européenne, Nice<br />
Martin P.C. SCHAAD – Bullying Bonn: Anglo-German Diplomacy on European<br />
Integration, 1955-61, Macmillan, London, 2000, viii + 243 p.- ISBN 0-333-69231-4. –<br />
47,50 £.<br />
Is ‘bullying Bonn’ fair comment on British policy towards Germany about European<br />
<strong>integration</strong> in the second half <strong>of</strong> the Fifties? Martin Schaad makes a good case that it is,<br />
in<strong>de</strong>ed, fair comment. He charts a rather <strong>de</strong>pressing episo<strong>de</strong> in Britain's attempt to come to<br />
terms with, and be part <strong>of</strong> the process <strong>of</strong> European <strong>integration</strong>. Although Schaad does not<br />
make the point, and he might have, what he is <strong>de</strong>scribing is the management <strong>of</strong> <strong>de</strong>cline on<br />
Britain's part and the politics <strong>of</strong> rebirth on the part <strong>of</strong> Germany and the embryonic European<br />
Union. Britain has not always managed <strong>de</strong>cline with grace and the EEC-EFTA <strong>de</strong>bate and<br />
policy confrontation is a case in point.