number 1 - Centre d'études et de recherches européennes Robert ...
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Marie-Thérèse Bitsch<br />
1959 d'ailleurs, la Ruhr dépose une <strong>de</strong>man<strong>de</strong> d'autorisation <strong>de</strong> cartel unique défendue<br />
par les <strong>de</strong>ux membres allemands du collège <strong>et</strong> envisagée d'un oeil favorable<br />
par les Français. La Haute Autorité en vient à imaginer la révision du traité (article<br />
65) pour pouvoir autoriser un cartel unique mais l'entreprise avorte car la Cour <strong>de</strong><br />
justice rej<strong>et</strong>te le proj<strong>et</strong> <strong>de</strong> révision en décembre 1961. Si la Ruhr a gagné du temps,<br />
elle a perdu l'espoir <strong>de</strong> légaliser le cartel unique. De guerre lasse, pour sortir <strong>de</strong><br />
l'impasse, on se résigne <strong>de</strong> part <strong>et</strong> d'autre, en mars 1963, à accepter un système <strong>de</strong><br />
<strong>de</strong>ux comptoirs. Sensé introduire une concurrence véritable, il fonctionne comme<br />
un seul cartel <strong>et</strong> ne trompe personne.<br />
Etant donnée la résistance alleman<strong>de</strong>, le gouvernement français ne se sent guère<br />
tenu <strong>de</strong> renoncer à l'ATIC. Paris tergiverse, cherche constamment à repousser les<br />
échéances, y compris par un recours contre les décisions <strong>de</strong> la Haute Autorité. On<br />
finit par trouver quelques aménagements qui limitent la mainmise <strong>de</strong> l'ATIC sur les<br />
importations <strong>et</strong>, avec le temps <strong>et</strong> la crise charbonnière, la Haute Autorité se fait<br />
moins intransigeante.<br />
Dans le cas <strong>de</strong> concentrations nouvelles, les conflits sont moins âpres <strong>et</strong> la<br />
Haute Autorité est pratiquement toujours amenée à donner son autorisation.<br />
Pourtant certaines <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s ont provoqué <strong>de</strong>s hésitations <strong>et</strong> <strong>de</strong> longs débats au<br />
sein du collège, par exemple lorsqu'il se trouve face à <strong>de</strong>s sociétés à interpénétrations<br />
d'intérêts multiples comme dans le groupe Sacilor créé par Si<strong>de</strong>lor <strong>et</strong> <strong>de</strong> Wen<strong>de</strong>l,<br />
<strong>et</strong> surtout lorsqu'il est confronté à la reconcentration <strong>de</strong> la sidérurgie<br />
alleman<strong>de</strong>. Tout en estimant qu'elle ne doit pas agir <strong>de</strong> manière discriminatoire à<br />
l'encontre <strong>de</strong> ces konzerns, la Haute Autorité se montre pru<strong>de</strong>nte. Exceptionnellement<br />
elle préfère décourager certaines <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s ou donner <strong>de</strong>s autorisations conditionnelles<br />
– notamment en imposant un contrôle <strong>de</strong>s investissements – plutôt que<br />
d'interdire les concentrations.<br />
Les quelques exemples évoqués ici n'épuisent évi<strong>de</strong>mment pas le suj<strong>et</strong>. Parmi<br />
les très nombreuses questions abordées par les auteurs <strong>de</strong> ce livre, beaucoup<br />
d'autres mériteraient d'être rappelées pour expliciter les métho<strong>de</strong>s <strong>et</strong> les moyens<br />
d'action <strong>de</strong> la Haute Autorité durant les quinze années <strong>de</strong> son existence, jusqu'à sa<br />
disparition – ou plus exactement son absorption par une Commission unique pour<br />
les trois Communautés – en 1967.<br />
❋<br />
Le "déclin" <strong>de</strong> la Haute Autorité commence vers la fin <strong>de</strong> la pério<strong>de</strong> transitoire qui<br />
coïnci<strong>de</strong> avec la mise en place <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux nouvelles Communautés. Dès la phase <strong>de</strong> la<br />
relance européenne <strong>de</strong>s années 1955-1956, elle est confinée au second rôle. Certes,<br />
lorsque le comité Spaak créé par la conférence <strong>de</strong> Messine se réunit à Bruxelles, un<br />
membre <strong>de</strong> la Haute Autorité (Spierenburg) participe au comité directeur <strong>et</strong> plusieurs<br />
<strong>de</strong> ses experts (Regul, Uri) sont appelés à collaborer. Mais lorsque l'Angl<strong>et</strong>erre quitte<br />
le comité en novembre 1955, les représentants <strong>de</strong>s organisations internationales sont<br />
invités, eux-aussi, à se r<strong>et</strong>irer <strong>et</strong> si un homme comme Pierre Uri continue à exercer<br />
une gran<strong>de</strong> influence, notamment dans la rédaction du rapport Spaak, c'est plutôt à<br />
titre personnel. En 1956, la Haute Autorité n'est pas invitée à la conférence <strong>de</strong> Venise<br />
qui approuve le rapport Spaak <strong>et</strong> m<strong>et</strong> en route la conférence intergouvernementale<br />
chargée d'élaborer les Traités <strong>de</strong> Rome. Au cours <strong>de</strong> ce processus, si elle est sollicitée