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Marie-Thérèse Bitsch
trop déséquilibrer leur balance des paiements. Aussi la Haute Autorité lance-telle
de plus en plus d'emprunts sur le marché financier des Six, en Allemagne et
au Benelux d'abord, puis également en France et en Italie, sans compter un
emprunt suisse un peu exceptionnel en 1956.
Cet afflux de capitaux donne à la Haute Autorité de larges capacités d'investissement.
Une règle, toujours respectée, s'établit d'emblée: quelle que soit la nature
de l'opération, l'apport de la Haute Autorité ne doit constituer qu'une fraction -en
général la moitié au maximum- de l'ensemble du financement d'un programme. Les
fonds provenant d'emprunts étant affectés, les prêts américains servent essentiellement
à moderniser la production, améliorer les rendements, ou créer de nouvelles
installations, dans les premières années surtout dans le secteur charbonnier, par la
suite, surtout au bénéfice de la sidérurgie. Les emprunts "intérieurs" servent à
financer aussi bien des opérations de modernisation ou de reconversion que des
programmes à objectifs sociaux plus marqués comme les constructions de maisons
ouvrières. L'ouvrage décrit presque année par année, les nombreuses opérations qui
ont profité de la manne de la Haute Autorité. Il est clair que l'Allemagne a été le
principal bénéficiaire assez loin devant la France qui précède les quatre autres partenaires.
Mais il est vrai aussi que la RFA fournit la plus grande partie du prélèvement
(environ la moitié), la France seulement un peu moins du quart, la Belgique
environ 10% et les autres pays nettement moins.
Les financements à but social constituent constamment une priorité pour la
Haute Autorité: aides non remboursables à la réadaptation des ouvriers licenciés
(d'abord surtout des mineurs, puis aussi des ouvriers de la sidérurgie), aides à la
recherche dans le domaine de la sécurité, de l'hygiène et de la médecine du travail
(lutte contre les poussières silicogènes, programme sur les affections cardio-pulmonaires
ou sur la pollution atmosphérique par les émissions sidérurgiques...).
Mais, incontestablement, le fleuron de la politique sociale de la Haute Autorité
réside dans la construction de logements ouvriers. Plusieurs programmes se succèdent
à un rythme rapide avec des prêts à 1% financés par le fonds de réserve ou
d'autres financés grâce aux emprunts "intérieurs", un peu plus onéreux mais encore
très intéressants. Le premier programme d'environ quinze mille logements lancé en
1954 n'est pas encore entièrement réalisé quand le deuxième est mis en route en
1956/1957, bientôt suivi d'un troisième décidé en 1958 puis d'un quatrième en
1961. L'année suivante, la Haute Autorité estime que deux cent quatre-vingt mille
logements sont encore nécessaires pour remplacer les baraquements provisoires ou
les logements insalubres. Elle lance donc un cinquième programme qui, plus que
les précédents, se préoccupe de la qualité de la vie (insonorisation, équipements
collectifs...). Avec un sixième programme (1965/1968) la Haute Autorité a contribué
à la construction de plus de cent mille logements au total qui ont obtenu une
aide globale d'environ deux cent quarante millions d'unités de compte. L'Allemagne
se place à nouveau au premier rang des bénéficiaires (trois cinquièmes de
l'aide) devant la France (12%), la Belgique (11%), l'Italie (7%), les Pays-Bas (5%).
❋
Dans d'autres domaines où la Haute Autorité se heurte aux entreprises et aux gouvernements
son action s'avère beaucoup plus aléatoire. Au fil des pages, l'ouvrage