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Vol. XXXVIII / 1 - Studia Moralia

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LE PAIN ROMPU À MANGER ET LE VIN VERSÉ À BOIRE, VISAGE DU CRUCIFIÉ 135<br />

Le pain et le vin sont encore des aliments destinés à être consommés<br />

et, par conséquent, à être assimilés à la substance de<br />

celui qui les consomme. Par le processus physiologique de la<br />

digestion, ils perdent leur consistance propre pour devenir celle<br />

de la personne qui en use. En tant qu’aliments, il y a donc en eux<br />

comme un indice d’unité, d’abandon d’eux-mêmes à l’autre qui<br />

va jusqu’à l’identification des substances au profit de celui qui<br />

consomme.<br />

Considérés sous cet angle, les éléments eucharistiques ne<br />

sont-ils pas la traduction spatio-temporelle par excellence de la<br />

capacité du Crucifié ressuscité d’avoir accès à l’intimité du<br />

croyant et de sa volonté de s’y unir au point de devenir une substance<br />

13 avec lui? En se donnant en nourriture, Jésus pénètre<br />

dans les “coeurs” selon un degré de profondeur que l’amour<br />

humain ne pouvait que rêver d’atteindre. Qui n’a pas entendu<br />

une mère dire à son enfant avec un fort sentiment d’impuissance<br />

toutefois: “je te mangerais tant je t’aime”? C’est le voeu de l’assimilation<br />

totale qui fait partie intégrante de l’amour humain,<br />

mais qui curieusement s’avère irréalisable entre les personnes<br />

humaines. En l’occurrence, on ne peut qu’admirer la puissance<br />

inventive de Dieu qui se sert des aliments du pain et du vin pour<br />

médiatiser dans le temps de l’Église la mort d’amour de son Fils<br />

pour les hommes et ainsi répondre à leur aspiration à la fusion<br />

totale 14 avec l’être aimé. De là, on voit que ce n’était pas en vain<br />

13<br />

Nous parlons ici de “substance” pour rester dans la ligne du phénomène<br />

de l’assimilation des éléments eucharistiques. À propos du rapport de l’eucharistie<br />

à l’Église, H. de Lubac parle plutôt de même “corps” et de même<br />

“chair”. Citons ce beau texte qui vient enrichir et compléter nos propres<br />

réflexions: “La Tête et les membres ne font qu’un seul corps. L’Épouse et l’Époux<br />

sont «une seule chair». Il n’y a pas deux Christs, dont l’un serait personnel<br />

et l’autre «mystique». Certes, la Tête et les membres ne se confondent pas,<br />

les chrétiens ne sont pas le corps «physique» (ou eucharistique) du Christ; l’Épouse<br />

n’est pas elle-même l’Époux. Toutes les distinctions demeurent, mais<br />

elles ne sont pas discontinuité. Aussi l’Église n’est-elle pas un corps quelconque;<br />

elle est le Corps du Christ. Ce que Dieu lui-même a uni, que l’homme ne<br />

le sépare pas: «qu’il ne sépare pas l’Église du Seigneur!»” H. DE LUBAC,<br />

Méditations sur l’Église (Th., 27), 1954, 135. (C’est l’auteur qui souligne).<br />

14<br />

Qui n’égale pas confusion, évidemment. En Dieu, plus l’union est<br />

étroite, plus s’affirme la différence. - Thérèse de Lisieux parle de l’effet de

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