Bulletin de liaison et d'information - Institut kurde de Paris
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REVUE DE PRESSE-PRESS REVIEW-BERHEVOkA çAPÊ-R.wisTA<br />
STA.<br />
CAMPAGNES<br />
SOLIDAIRES<br />
OCTOBRRE 1993 N° 68<br />
Des Kur<strong>de</strong>s<br />
enAuvergne<br />
Fuyant la guerre, 90 Kur<strong>de</strong>s vivent<br />
aujourd'hui à Vic-Le-Comte, dans le Puy-<strong>de</strong>-<br />
Dôme.<br />
l<br />
,y a cinq ans à pein.e, ils étaient traqués par l'armée<br />
<strong>de</strong> Sadd am Hussein, là-bas, dans ce Kurdistan qui .<br />
pourtant ne Figure sur aucune carte. Fuyant les bombar<strong>de</strong>ments<br />
chimiques du dictateur <strong>de</strong> Bagdad, échoués<br />
dans l'enFer d'un camp <strong>de</strong> réfugiés en Turquie, ils vivent<br />
désormois à Vic-le-Comte, bourg du Puy-<strong>de</strong>-Dôme. A<br />
l'origine <strong>de</strong> c<strong>et</strong> exo<strong>de</strong>, la volonté a'une Femme: Danielle<br />
Mitterrand, prési<strong>de</strong>nte <strong>de</strong> la Fondation France-libertés.<br />
ConFrontée aux conditions <strong>de</strong> vie misérables du<br />
camp qu'elle visitait en août 1989, elle offre alors à<br />
ceux gui le désirent le choix <strong>de</strong> l'exil en France. Pour<br />
lus d'une centaine d'entre eux, las <strong>de</strong> l'entassement<br />
F16 000 habitants au km 2 ) <strong>et</strong> <strong>de</strong> l'hostilité <strong>de</strong>s autorités<br />
turques, c'est le grand départ.<br />
l'Auvergne est une terre d'accueil, cela on le savait.<br />
Mais rien n'est simple quand on doit se charger subite-<br />
ment <strong>de</strong> personnes mala<strong>de</strong>s <strong>et</strong> déracinées. Après trois<br />
mois passés à Bourg lastic, un camp militaire transFor-<br />
.mé pour l'occasion en centre d'hébergement, la Fondation<br />
France-libertés part en chasse <strong>de</strong> véritables<br />
logements <strong>et</strong> Faitappel à la solidarité <strong>de</strong>s villages.<br />
Un début d'occi<strong>de</strong>ntalisation<br />
«Nous n'étions pas dans l'enthousiasme délirant,<br />
mais face à l'urgence, nous ne pOl!vions qu'accepter.»<br />
avouera plus tard M. Bertrand. le maire <strong>de</strong> Vic-le-<br />
Comte. A l'appel <strong>de</strong> France-libertés, les Vicomtois<br />
répon<strong>de</strong>nt présent <strong>et</strong> se mobilisent.<br />
Au mois d'octobre 1989, 90 Kur<strong>de</strong>s s'installent enFin<br />
dans le bourg. En coopération avec les association!;<br />
142<br />
Hawra <strong>et</strong><br />
.Julien,fiers<br />
d'être<br />
copains<br />
A Vic le<br />
Comte, les<br />
plus<br />
anciens<br />
restent les<br />
gardiens<br />
<strong>de</strong> la<br />
tradition<br />
humanitaires locales (dont l'Association Franco-Kur<strong>de</strong><br />
<strong>de</strong> Vic-le-Comte créée pour l'occasion) M. Bertrand<br />
s'attelle à la difficile tâche d'intégrer ces nouvelles<br />
Famillesdans le tissu social local. «Au départ, nous les<br />
avions logées plutôt sommairement, mais très vite, nous<br />
avons débloqué <strong>de</strong>s crédits afin <strong>de</strong> rénover les appartements<br />
disponibles à Vic-Le-Comte» explique-t-il.<br />
Si selon lui, «<strong>de</strong>s choses ont été mal faites», les efforts<br />
en matière <strong>de</strong> logement n'en sont pas moins soutenus.<br />
Pour preuve, l'acquisition toute récente par la municipalité<br />
d'une maison qui <strong>de</strong>vrait perm<strong>et</strong>tre <strong>de</strong> loger très<br />
bientôt <strong>de</strong>s Famillesen situati.onprioritaire. .<br />
Quatre ans après l'arrivée <strong>de</strong>s Kur<strong>de</strong>s, les habitants<br />
ne Fontplus la différence. Ainsi c<strong>et</strong>te commerçante pour<br />
qui «tout se passe pour le mieux entre eux <strong>et</strong> nous».<br />
Côté kur<strong>de</strong>, Ahmed Saïd, un <strong>de</strong>s responsables <strong>de</strong> la<br />
communal.lté, ne tarit pas d'éloges sur ses hôtes :<br />
«l'accueil <strong>de</strong>s gens a été très bon, if n'y a rien à redire»<br />
affirme-t-il.<br />
Cela n'a malheureusement pas été toujours le cas.<br />
l'affaire dite "du Foulard islamique" reste encore gravée<br />
dans les mémoires. Comme' partout en France, le climat<br />
est à l'époque tendu. On découvre alors <strong>de</strong>s inscriptions<br />
sur les murs injuriant le maire, certaines rumeurs vont<br />
bon train .... pour Finalement s'éteindre, Faute d'arguments.<br />
En <strong>et</strong>t<strong>et</strong>, Ahmed <strong>et</strong> les siens offrent bien peu <strong>de</strong><br />
prise aux sentiments anti-islamiques. «Ils ont toujours<br />
fait un effort <strong>de</strong> discrétion» note le maire à propos <strong>de</strong><br />
ses concitoyens musulmans. «S'ils pratiquent, c'est uniquement<br />
dans le cadre familial. Quant aux femmes<br />
kur<strong>de</strong>s, nombreuses sont cel/es qui ont cédé aux<br />
charmes <strong>de</strong> TQ coqu<strong>et</strong>terie française. Et je vous m<strong>et</strong>s au<br />
défi <strong>de</strong> les reconnaÎtre dans la rue! »<br />
Le rêve du r<strong>et</strong>our<br />
la palme d'or <strong>de</strong> l'intégration revient pourtant aux<br />
enFants kur<strong>de</strong>s. Contrairement à bon nombre <strong>de</strong>' leurs<br />
parents, ils parlent parfaitement le Français, se sentent<br />
totalement chez eux. Regroupés dans une classe spéciale<br />
<strong>de</strong> mise à niveau pendant la première année, ils suivent<br />
aujourd'hui une scolarité normale. M. laffon, le<br />
directeur <strong>de</strong> l'école primaire ne cache d'ailleurs pas sa<br />
satisFaction: «ils veulent souvent plus s'en sortir que les<br />
Français» affirme-t-il, peut-être en pensant à c<strong>et</strong>te élève<br />
qui c<strong>et</strong>te année, <strong>et</strong> quatre ans seulement après son arrivée<br />
en France, vient d'entrer au collège tout proche.<br />
Mais dans une région qui, pas plus qu'une autre,<br />
n'échappe 'à la réalité <strong>de</strong> la crise économique, l'intégration<br />
par le travail est une <strong>de</strong>nrée rare que beaucoup<br />
d'adultes kur<strong>de</strong>s ne peuvent ,goûter. Anciens combattants<br />
pour la plupart, à la ditticulté <strong>de</strong> la langue vient<br />
s'ajouter souvent le manque <strong>de</strong> qualiFication. Alors, <strong>de</strong><br />
stages <strong>de</strong> Formation en CES (certains sont RMlstes), ils<br />
atten<strong>de</strong>nt comme les autres une éventuelle reprise.<br />
Et malgré l'exil, malgré toutes les difficultés du quotidien,<br />
les Kur<strong>de</strong>s <strong>de</strong> Vic-le-Comte partagent encore un<br />
même rêve : «Quand la guerre sera finie, je veux<br />
r<strong>et</strong>ourner dans mon pays.»<br />
J.L Batalfer