Bulletin de liaison et d'information - Institut kurde de Paris

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4
MAI 1995
,.
TURQUIE-ARMENIE
L'état major turc établit une
"zone de sécurité" dans la province de Kars
Sila Turquie a annoncé la
levée du blocus aérien
imposé depuis plus de 2
ans à l'Arménie dont les
avions pourront survoler prochainement
le territoire turc, la levée du
blocus terrestre, qui concerne sans
doute plus étroitement les populations
de part et d'autre de la frontière
arméno-turque, est loin d'être à
l'ordre du jour. Il n'est ainsi pas fortuit
que quelques jours à peine
après l'annonce à Washington par
le Premier ministre turc Mme Tansu
Ciller, de l'ouverture d'un couloir
aérien pour les avions se rendant
en Arménie, le chef d'État major
des forces armées turques a
annoncé le verrouillage total de la
région frontalière de Kars. Le chef
d'état major turc, dont on se
demande s'il n'est pas le véritable
dirigeant d'une Turquie où la guerre
contre les Kurdes a à nouveau
déplacé vers l'armée le centre de
gravité du pouvoir, a en effet fait
.part samedi dernier de la création
d'une zone de sécurité dans la province
de Kars, placée sous un
quasi régime de loi martiale pour
une durée de six mois. Dans sa
déclaration, le responsable militaire
turc a justifié cette mesure par la
nécessité de prévenir les infiltrations
de rebelles du PKK sur le territoire
turc depuis l'Arménie.
L'argument de la préven-
tion contre une menace kurde qui
serait encouragée par l'Arménie
n'est certes pas nouveau; mais
alors que le gouvernement turc
semble vouloir découpler le blocus
imposé à l'Arménie du conflit azéroarménien,
qui avait pourtant suscité
le verrouillage des frontières avec
l'Arménie par Ankara, solidaire des
"frères d'Azerbaïdjan", il passe
manifestement aujourd'hui au premier
plan, justifiant .Ie maintien du
blocus terrestre. Les forces de
sécurité turques ont en effet affirmé
récemment que des rebelles
kurdes s'étaient réfugiés en Iran et
en Arménie après la vaste offensive
lancée le mois dernier par l'armée
turque dans le nord de l'Irak.
Du 1er mai au 30 octobre,
seuls les personnes munies d'un
laissez-passer dûment fourni par
les forces militaires pourront donc
circuler dans la province de Kars,
où des tracts ont été par ailleurs
distribués par les militaires à la
population locale, l'appelant à se
tenir éloignée des montagnes et ~
éviter les pâturages de haute montagne,
soupçonnés de cacher des
repères des Kurdes du PKK. Bien
plus, pendant toute cette période,
la région sera entièrement livrée
aux militaires turcs, déjà présents
dans cette région comme dans tout
le sud-est anatolien en proie à la
guerre totale lancée par les forces
turques contre les rebelles kurdes,
et où ils effectueront des
manoeuvres d'entraînement militaires.
Là encore, au-delà de la
guerre contre les Kurdes, on ne
peut que souligner la coïncidence
avec les exercices militaires
conjoints menés récemment par les
forces arméniennes et russes sur le
territoire de l'Arméniè, auxquelles
les forces turques apportent ainsi
une réponse appropriée qui ne
manquera sans doute pas de susciter
des commentaires à Moscou.
Cette mesure annoncée
par l'état-major turc trahit en tout
cas les dispositions réelles de la
Turquie à l'égard de l'Arménie dont
elle ne semble pas à lever le blocus,
malgré les rumeurs, voire les
appels en ce sens, qui avaient
couru notamment dans la presse
turque. Elle vient minimiser l'effet
d'annonce produit par un gouvernement
turc otage des militaires, favorables
au maintien de la pression
avec Erévan et insensible aux exigences
de la population et des responsables
locaux de la province de
Kars, relayées par de nombreux
analystes politiques et économiques
turcs concernant les bénéfices
économiques et politiques que
pourrait tirer la Turquie d'une
ouverture de la frontière avec
l'Arménie et des voies de communication
reliant Kars à Gumri.
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