Bulletin de liaison et d'information - Institut kurde de Paris

• 2 • Bulletin ,le liaison et ,1'ill!onnCltiOll nU 122-123 • 1\1"i-)IIill 1995
la République, l'un des ministres turcs,
M.Gökdemir, affilié à l'extrême-droite et
connu dans les années 70 sous le:sobriquet
d'«Ayvaz le Commando», s'est senti libre de
qualifier les trois députées européennes,
Mmes. Claudia Roth, Catherine Lalumière
et Pauline Green, en mission officielle en
Turquie, de «prostituées». Cette remarque,
qui a scandalisé les parlementaires
européens dans leur ensemble (et une
partie de la presse turque), a suscité
l'extrême-droite en Turquie, mais a comblée
et embarrassé le gouvernement turc, dirigé
par une femme ! Les excuses officielles du
Premier ministre Çiller ont quelque peu
apaisé les réactions, mais le ministre en
question n'a accepté à présenter des excuses
qu'à demi-mot et sans exprimer le moindre
regret : « si cela peut les soulager, je leur
présente mes excuses pour ce malentendu».
Sans renoncer aux poursuites judiciaires
éventuelles, les députés européennes ont
regretté, par la voix de Mme. Pauline
Green, l'absence de sanction contre ce
ministre qui, à la faveur d'un remanie-ment
gouvernemental a même gagné du galon
Alliée de fait avec l'extrême droite, Mme.
Çiller a dû se contenter de l'explication
scandaleuse que lui a donnée son ministre.
Selon cette explication citée par le quotidien
Cumhuriyet, le ministre aurait déclaré: «je
n'ai pas dit 'prostituée' mais 'putain' et le public
turc m'approuve»,
D'autres dignitaires turcs ont soutenu
explicitement ou implicitement ce politicien
malotru. Hûsamettin Cindoruk, président
de l'Assemblée turque, réputé plus sérieux,
s'est déclar~ solidaire de Gökdemir. Les
parleinentaires européens auraient, selon
lui, .« provoqué des réactions justifiées du côté
turc ». Enfin, le président Demirel, a fait
preuve d'égards particuliers envers ce
ministre, en l'incluant dans sa délégation
officielle en visite au Kazakhstan.
LA COMMISSION EUROPÉENNE DES DROITS
DE rHOMME DÉCLARE RECEVABLES LES REQUÊTES
DES DÉPUTÉS KURDES EMPIDSONNÉS
E Parlement européen a adopté,
le 15 juin 1995, une résolution
réaffirmant « son opposition à
l'Union douanière avec la Turquie
tant que les députés kurdes restent
en prison et que les droits du
peuple kurde ne sont pas
reconnus ». De son côté, la
Commission européenne des droits de
l'Homme a considéré que les requêtes
présentées en juin 1994 par des députés
kurdes contre l'État turc étaient
recevables, à la lumière de l'article 6 de la
Convention européenne des droits de
l'Homme. En ce qui concerne la violation
d'autres dispositions de la Convention par
les autorités turques, la Commission
réserve son jugement à l'épuisement des
recours internes, notamment au verdict de
la Cour de cassation turque, saisie par les
députés. Avant de déférer cette affaire
devant la Cour européenne des droits de
l'homme, dont la Turquie reconnaît la
compétence, la Commission propose aux
deux parties de chercher «un règlement à
l'amiable» qui, dans le contexte turc
actuel, paraît improbable.
En attèndant, un autre organe du Conseil
de l'Europe, son Assemblée parlementaire,
a de nouveau «exigé la libération des
députés emprisonnés pour délit d'opinion».
Mais les autorités turques se réfugient
derrière «l'indépendance de la justice» de
leur pays pour opposer une fin de non
recevoir à ces «appels» et «exigences»
d'autant que les gouvernements
occidentaux ne semblent guère leur en
tenir rigueur.
Cependant le sort des députés kurdes
emprisonnés continue d'émouvoir
l'opinion publique. En janvier des députés
norvégiens issus de tous les partis
politiques représentés au Parlement
avaient proposé la candidature de Leyla
lana pour le prochain Prix Nobel de la
Paix. Pour soutenir c.ette initiative Mme.
Danielle Mitterrand s'est rendùe, début
mai, à Oslo où elle a rencontré de
nombreuses personnalités. Au cours d'une
conférence de presse donnée au Parlement
norvégien elle a déclaré que: «le choix de
Mme. Zana constituerait, pour le Prix
Nobel, une grande ouverture vers le mondé
musulman, Leyla Zan a étant à la fois
femme, musulmane mais laïque et élue du
peuple». Elle a également ajouté que trois
lauréats du prix Nobel de la paix, Oscar
Arias Sanchez (1987), Adolfo PeJez
Esquivel (1980) et Betty Williams (1976)
soutenaient cette demande.
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