Bulletin de liaison et d'information - Institut kurde de Paris

Le Soir - 8 juin 1995
J
0-
.-
Sur l'intervention contre
le PKK en Irak l'union
douanière avec î'Europe,
la démocratisation ...
• Quel bilan tirez-vous personnellement de
la récente opération militaire turque contre
le PKK dans le nord de l'Irak?
Q C'était une opération dirigée contre les
terroristes Qui avaient transformé les
camps du nord de I7rak en bases pour
attaquer nos viRages.Il s'agissait d'em,*
cher ces attaques et en ce sens, fopération
a été un succès. A voir les armes et les
munitions trowées dans ces bases, on
mesure les dégAts Qu'ilsauraient pu causer
sur notre territoire et à nos citoyens si cette
opération n'avait pas été menée.
• Le bilan n'est-il pas plus négatif sur le
plan diplomatique?
Q Tout le monde a vu Que c'était une
opération dirigée uniquement contre les
tefforistes et causée par le vide d'autorité
existant au nord de I7rak depuis la gueffe
du Golfe. La Turquien'était pas responsable
de ce vide d'autorité. Certaines personnes
ont peut~tre pr~té des idées expansionnistes
à la Turquie,mais c'était un malentendu.
Il n'y a pas de dommage diplomatique dès
lors Que fon comprend bien la raison de
cette opération et son résultat
• Que répondez-vous aux Européens qui
reprochent à la Turquie son approche exclusivement
militaire du problème kurde?
Q L'approche n'est pas exclusivement militaire.
L'approche militaire est réservée aux
terroristes,
comme dans les autres pays
européens. Il faut séparer le tefforisme des
demandes légitimes pour la démocratie ou
une plus grande participation. Nos citoyens
d'origine kurde, turque ou autre jouissent
tous des m~mes lois. Nous voulons développer
notre démocratie dans le sens d'une
plus grande participation, d'une plus libre
expression des idées politiques et d'une
administration locale plus étendue.
Décisions en juin
• Beaucoup de promesses ont été faites,
notamment par le Premier ministre, quant à
l'amélioration des droits de l'homme et la
reconnaissance des droits culturels. des
Kurdes. Que peut-on attendre concrèteiiient
dans un proche avenir?
Q On peut attendre Que toutes ces promesse$
seront réalisées. C'est sèulement
une Questionde temps. C'est en fait l'action
tefforiste Qui rend la réalisation de ces
promesses plus difficile. Seul le Parlement
peut changer la Constitution et les lois dans
le sens de ces promesses, non le Premier
Erdal
Inönü
ministre, et le Parlement agit sous 1'inR~
ce des citoyens. Si, dans cet état de terr0-
risme rampant, la majorité des citoyens
croit QU'on ne peut créer un Etat plus
tolérant, mais Qu'il faut d'abord réduire le
tefforisme, le premier devoir est de combattre
ce tefforisme. Nous essayons né~
moins de poursuivre notre action de démtr
cratisation et notre action législatiJle au
Parlement.
• Peut-on encore attendre à cet égard des
décisions avant la fin de la présente session
parlementaire?
Q Oui, évidemment. Un paquet de modifications
portant sur 24 articles de la Constitution
a été longuement discuté en commission
et a été présenté ce lundi à la préside~
ce du Parlement. La séance plénière en
sera saisie la semaine prochaine. Comme
plus de trois cents députés des partis de la
majorité et de l'opposition ont déjà signé ce
paquet, il y a de très grandes chances Que
ces changements soient adoptés avant la
fin dejuin. Des modifications de lois, Quine
requièrent pas de majorité des deux tiers,
sont également à l'agenda du Parlement,
notamment la loi antitefforiste.
• En son article 8 qui limite la liberté
d'expression?
Q En effet J'espère QU'onveffa également
un changement sur ce plan avant la finjuin.
• Est-ce à dire que les parlementaires prokurdes
emprisonnés pourraient être libérés
sous peu?
Q C'est une autre Question. Il s'agit ici
d'une action judiciaire dans laquelle le Parlement
ne peut interférer. On attend encore à
cet égard le verdict de la Haute cour.
• Pensez-vous, d'après vos contacts avec
les milieux européens ici à Bruxelles, Que le
Parlement européen va approuver raccord
d'union douanière conclu entre les Quinze
et la Turquie?
Q Je pense bien Que le Parlement européen
examinera cette Question sérieusement
et arrivera à un avis conforme. La
demière fois Qu'il a eu à débattre de cette
Question, il y avait le malentendu concernant
l'action au nord de I7rak et cela a
influencé la discussion. Mais il n'y a plus
maintenant de raison Que cette mawaise
atmosphère persiste. Je crois Quele Parlement
européen aura la bienveillance de
comprendre Quele Parlement turc est aussi
un parlement, Qu'onne peut lui donner des
ordres et Qu'il agit dans un but démocrati-
Que. Je crois Que le Parlement européen
comprendra aussi Quefunion douanière est
une étape dont fUnion européenne et la
Turquie bénéficieront parallèlement et co~
jointement
• La Turquie n'apprécie guère l'expérience
de rautonomie kurde dans le nord de l'Irak,
pas plus Qu'elle n'apprécie le maintien des
sanctions internationales contre l'Irak. Estee
à dire Qu'Ankara n'est plus à ce sujet sur
la même longueur d'ondes Que Washington?
Q Non. En Irak, la Constitution actuelle a
admis une autonomie pour les Kurdes au
nord du pays. La difficulté est que les deux
parties, le régime irakien et les groupes
vivant au nord de I7rak, ne sont pas arrivés
à un consensus pour appliquer cette Constitution.
Nous souhaitons qu'ils arrivent à un
accord sur ce plan et que I7rak devienne un
Etat normal Nous n'avons aucune objection
à ce que certains jouissent d'une autonomie
selon la ConstitUtion. Notre malaise tient au
fait qu'On n'est pas arrivé à une situation
normale au nord de I7rak. On en a vu les
conséquences en matière de tefforisme
dirigé contre la Turquie.
• Selon vous, les sanctions contre l'Irak
devraient~lIes être levées?
Q Elles devront ~tre levées. Si elles ne le
sont pas encore, c'est parce qu'il n'y a pas
encore de paix entre I7rak et le Conseil de
sécurité des Nations unies. Celui-ci pense
que I7rak n'a pas encore rempli toutes les
conditions nécessaires.
• Est-ce aussi votre avis?
Q L'Irak a rempli beaucoup des conditions
demandées. Il a reconnu les frontières du
Koweït, il n'a plus d'armes nucléaires. Restent
urie question d'armes chimiques et une
question de prisonniers de gueffe à régler.
/I est vrai que I7rak souffre beaucoup des
sanctions, et nous en souffrons également
beaucoiJp. La rupture de nos relations économiques
avec I7rak nous a coOté jusqu'à
présent quelque chose comme 25 milliards
de doUars. C'est pourquoi nous souhaitons
la levée des sanctions aussi vite que possible.
Mais nous faisons évidemment partie
des Nations unies et nous ne pouvons pas
les lever unilatéralement. Nous souhaitons
que f1rakaffive à un accord avec fONU.
Propos recuellls par
PERRE LEFÈVRE
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