Information and liaison bulletin - Institut kurde de Paris

Revue de Presse-Press Review-Berhevoka Çapê-Rivista Stampa-Dentro de la Prensa-Basin ôzeti
combattantes qui lui vouaient une admiration
sans bornes. L'autre mur est occupé par l'étoile
rouge à cinq branches du parti. « Chacune repré¬
sente les régions kurdes de Syrie, d'Irak, d'Iran, de
Turquie et de l'ex-Union soviétique », me précise
le «commandant» en m'offrant une tasse de thé.
S,ur 35 millions de Kurdes, une quinzaine de
millions vivent en Turquie. En Irak, ils sont 5 mil¬
lions et jouissent d'une autonomie avec un gou¬
vernement local dirigé par Massoud Barzani.
Partout, les combattants du P.k.k. se sentent chez
eux, car on trouve dans leurs rangs des hommes et
des femmes des cinq régions. «Le P.k.k. n'est pas
un parti composé de terroristes, tient à souligner
le "commandant". On lutte pour libérer notre
pays. C'est pour cela que nous nous battrons
contre tous ceux qui viendraient nous en empê¬
cher. » Appuyé sur un coussin, un autre camarade
hoche la tête pour montrer son approbation. L'es¬
prit critique n'a pas cours au P.k.k., même lorsque
les grands chefs sont absents. «Ils sont en ce mo¬
ment au nord du Kurdistan», me lâche-t-il. Sous-
entendu : ils se sont réfugiés en Iran,juste au-delà
de la frontière, pour se protéger d'une éventuelle
incursion turque. Le pays des mollahs est à peine
à une dizaine de kilomètres à vol d'oiseau. « L'ar¬
mée iranienne nous a bombardés le mois dernier»,me
souffle le «commandant». Mais de l'au¬
tre côté de la frontière, les hameaux et les villages
sont aussi habités par des Kurdes, qui n'hésitent
pas à aider leurs frères au nez des pasdarans.
Les femmes composent la moitié des 5000 à
6000 rebelles, dont près de 2000 restent dans les
montagnes du Kurdistan turc. «Elles luttent aussi
pour imposer leurs choix, poursuit le "comman¬
dant". Elles sont égales aux hommes et capables
d'agir de la même manière. » Dans la société féo¬
dale kurde, nombre de jeunes filles préfèrent
monter au maquis plutôt que de subir le joug fa¬
milial traditionnel. C'est le fusil à la main qu'elles
obtiennent leur émancipation. Récemment en¬
core, une liaison entre un homme et une femme
était, dans le maquis, un crime punissable de la
peine de mort.A 36 ans, le «commandant» n'est
pas marié. «Impossible pour nous de fonder une suit Zahide. C'était pour nous une tragédie. Il
famille en restant dans la montagne, explique-t-il. était le père de la révolution. Qu'allait-on deve¬
Ce n'est pas la priorité du parti ni la mienne, tant nir sans lui ? Après son arrestation, le parti a été
que nous n'aurons pas obtenu notre liberté. C'est divisé. J'étais éc etj'ai préféré m'éloigner.»
plus important que d'avoir des enfants. »
Zahide s'est mariée avec un homme qu'elle avait
Dans le maquis, les femmes sont dans le connu dans la guérilla. Aujourd'hui, à 28 ans, elle
même cas. Zahide Hemid, qui a passé onze ans a un petit garçon de 10 mois prénommé Oniar.
dans les montagnes avant d'intégrer le parti de «Je n'ai fait qu'imiter d'autres responsables.
Macsoud Barzani, avait 16 ans lorsqu'elle a aban¬ Même Osman Ocalan, le propre frère d'Apo,
donné son lycée de Kirkouk pour rejoindre la ré¬ avait voulu changer les règles. Sous couvert de
bellion. A Arbil, la ville du Kurdistan irakien où réformes sociales, il a épousé une Iranienne. »
je la rencontre, elle me raconte son histoire : « On Osman Ocalan a quitté le P.k.k. le 1" juin
m'a d'abord enseigné l'histoire, le programme du 2004, en fuyant à travers les montagnes avec sept
parti et la révolution soviétique. Ont suivi les compagnons, car on ne badine pas avec les déser¬
cours pratiques : tirs, entraînements, coups de teurs au sein du parti. Il nous a lui aussi donné ren¬
main et embuscades. Lors de ma première atta¬ dez-vous à Arbil. Il s'est rasé la moustache pour
que, j'avais peur pour moi et mes
amis. Ça tirait de partout. On a dé¬ "îahide^passé-
moins ressembler à son frère Abdul¬
lah, son aîné de neuf ans. « Il y a qua¬
nombré quatre tués, trois hommes
et une fille qui venaient de Syrie.
onze ans en
rébellion. Tous
tre mois, explique-t-il, la police a ar¬
rêté un kamikaze qui projetait de
Après, on a eu droit à la conférence
critique. Le comportement au com¬
bat de chacun était évalué devant
les autres, afin de ne pas répéter les
mêmes erreurs. Notre quotidien
était simple : lever à 5 heures en
les matins, c'était
lèvera 5 heures
en criant:
«Notre sang pour
Ocalan»
lancer sa voiture piégée contre ma
maison. Le coup venait de l'aile gau¬
che du P.k.k. Les combattants ne
craignent ni les bombardements ni
les menaces d'invasion. Dans ces
cas-là, ils s'évanouissent dans la na¬
criant "Victoire ! Victoire ! Notre sacrifice et no¬ ture. Le P.k.k. veut le dialogue. Mais pour désar¬
tre sang pour Apo [Le diminutif de Ocalan] ! On mer, il faut que l'armée se retire du Kurdistan turc
est avec toi, par notre sang et par notre esprit !" et qu'un comité indépendant statue sur la santé
Notre leader est considéré comme un saint. Une d'Apo, qui s'est dégradée. Le problème, c'est que
fois terminés les vivats à sa gloire, on partait en l'armée turque veut éliminer tout le P.k.k. » Cent
patrouille ou on recevait un enseignement. Les mille soldats turcs seraient déployés le long de la
filles vivaient dans des cabanes à l'écart des gar¬ frontière avec, pour objectif, la création d'une
çons. Il nous était interdit de parler entre nous si zone tampon en Irak, comme Israël l'a fait jadis
l'on ne portait pas de ceinture bien serrée autour au Liban pour protéger la Galilée. En arrivant à
de la taille. » En fait, les chefs prenaient des ga¬ Kani Massi, à 10 kilomètres de la frontière, la ten¬
ranties pour que les jeunes maquisards ne puis¬ sion est déjà perceptible. Des hommes en armes
sent pas se déshabiller rapidement derrière un sont rassemblés devant le siège du Parti démocra¬
bosquet : l'amour était reporté après la libéra¬ tique du Kurdistan (Rd.k.) de Massoud Barzani.
tion ! Si une liaison se produisait malgré tout en¬ « On veut la paix. Mais si les Turcs franchissent la
tre deux combattants, les fautifs étaient enfermés frontière, on défendra nos villages, me dit le chef
séparément pendant deux ou trois mois, à reco¬ du Parti Rizgar Kesteyi. S'ils entrent, ils ne pour¬
pier les préceptes du parti. « Quand on a appris ront plus sortir. Ils devraient reconnaître que le
qu'Apo avait été arrêté, on ne l'a pas cru, pour- Rk.k. a changé. Ce n'est pas Al-Qaïda. »
Kurdistan Irakien, et Jalal Talabani, le président irakien, également un Kurde. 4. George W. Bush a reçu le Premier ministre turc Erdogan dans le bureau Ovale, à la Maison-Blan¬
che, lundi 5 novembre. 5. Zahide Hemid est entrée dans la guérilla à 16 ans. Elle l'a quittée en 2004. Elle est aujourd'hui cadre du P.d.k., le parti du Kurdistan irakien.
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