ISS 25 (1995).pdf - The International Council of Museums

En 1972 se succectent la Table ronde de Santiago du Chili et Ie colloque ICOM de Bordeaux­
Istres-Lourmarin ("Ie musee est une institution au service de la communaute"), puis les colloques
intemationaux du Creusot, sous une impulsion et dans un contexte museaux (patrimoine industriel et
societe contemporaine, 1976 ; Proletariat et militantisme ouvrier, 1977). Des mots surgissem alors
qu'on n'avait jamais entendus dans Ie domaine museal : identite, territorialite, volontariat,
participation, communaute, formation, developpement. Ds som ensuite repris un peu partout dans Ie
monde mais plus particulierement dans les pays emergeant d'annees de colonialisme, ou de dictature,
ou en developpement (Afrique, Amerique laline, plus tard "pays de l'Est" ... ) ou pays a tradition
communautaire (Scandinavie, Canada) : les Declarations du Quebec et d'Oaxaca (1984) s'inscrivent
dans la mouvance de la nouvelle museologie. La France a ete pilote dans ce mouvement et nombreux
sont ceux venus puiser leur inspiration a l'Ecomusee du Creusot, terrain industriel et ouvrier oil pour
la premiere fois s'est developpee it partir de I'institution myseale une action culturelle participative
d'envergure.
Mais au milieu des annees 1980, en France (et, curieusement, sous un regime de gaucbe), ces
experiences pionnieres qui reposaient en grande partie sur Ie volontariat d'un public partenaire, des
moyens financiers modestes, un investissemem considerable de la part de leurs responsables, se
trouvent depbasees par rapport it une politique culturelle nouvelle qui veut que la culture desorrnais se
rentabilise et que, si possible, elle soit productrice d'argent. Cela va peu it peu colncider avec Ie declin
d'un certain nombre de bassins industriels oil se developpait ce type d'experience, et l'emergence de
preoccupations d'un autre ordre.
Paradoxalement on construit de nombreux musees nouveaux et l'on n!amenage bon nombre de
musees existants. L'accent est mis sur Ie batiment, une arcbitecture de prestige, soit dans la
rebabilitation de batiments anciens, soit dans la construction d'edifices ultramodemes et
spectaculaires, souvent devolus it I'exposition de I'art contemporain. La notion de patrimoine penetre
peu it peu les menta1ites mais parallelement la memoire est vulgarisee, "trafiquee" c'est-a-dire
exploitee par la publicite commerciale, et finalement desactivee. En France l'ere des "grands travaux"
marque I'importance et Ie prestige de la culture mais en meme temps rien n'est plus eloigne de I'idee
de communaute ... 11 moins que cela ne devienne justement Ie signe prestigieux d'une identite culturelle
francaise.
Seules des occasions comme un anni versaire majeur rassemblent pour la rememoration : ces
derniers temps, 11 I'occasion du cinquantenaire de la fin de la deuxieme guerre mondiale, se multiplient
en France les expressions des memoires collectives des differentes communautes qui ont participe a
cene guerre, afi.n de se souvenir ensemble d'une experience commune (a Paris on peut citer par
exemple Ie tout nouveau Musee Jean Moulin et I'exposition actuellement presentee au Musee
d'histoire contemporaine et intitulee "La deportation, Ie systeme concentrationnaire nazi"). En meme
temps demeure dans la penombre la mauvaise conscience de la part de collaboration, bonte dOni la
memoire francaise reste troublee.
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