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EN QUETE V'UN REEL LINGUISTIQUE I83
du cadre theorique herite de la grammaire grecque. L'essentiel du
travail philologique consiste en une activite de transmission. it la fois
par la copie des manuscrits et par la reconquete en quelque sorte
humaniste du terrain cede it la barbarie. Les philologues, si ce terme
convient, du Moyen age sont les copistes, les maitres de grammaire et
de rhetorique, et les missionnaires voues it l'evangelisation des esprits.
Tout se passe comme si la philologie ne pouvait exister separement des
taches modestes auxquelles l'epoque par necessite la cantonne. La
realite du moment est celle de la sauvegarde, it laquelle ne se superpose
aucun artefact epistemologique, sinon celui de la speculation logique.
Autrement dit, la langue ancienne (grecque ou latine) ne semble pas.
pour Ie Moyen age occidental. jouir d'une existence independante des
textes qui l'incarnent.
L'Orient byzantin presente un visage quelque peu different. Les
philologues byzantins perpetuent la tradition exegetique de l'antiquite,
sans la moindre innovation toutefois, dans Ie fond comme dans la
forme. Beaucoup de leurs remarques semblent droit issues des scholies
antiques. Les realisations monumentales des encyclopedies et des lexiques
(la Souda, Photius, par exemple) ou, plus modestement, les traites
ressortissant it la technographie grammaticale (relatifs notamment aux
dialectes. a l'accentuation ou autres) en imposent pour ainsi dire par Ie
caractere relativement acheve du propos et de la mise en forme. De
pres toutefois, les choses sont moins impressionnantes. Les sommes de
la philologie byzantine sont Ie creuset OU toute la science grammaticale
d'avant se trouve recueillie, voire deversee. Le savoir, en meme temps
que Ie savoir-faire, de l'antiquite grecque se prolonge it Byzance sans
grande nouveaute, sinon sous la forme d'une volonte encyclopedique de
totaliser les acquis de la philologie classique, en les accumulant dans des
syntheses qui sont autant de reservoirs informes de connaissances mal
organisees. Pour Ie Moyen age occidental. la realite linguistique de
l'antiquite est principalement latine et textuelle; Ie grec est Ie parent
pauvre de la tradition occidentale. Pour la philologie byzantine, la
realite linguistique de l'antiquite est substantiellement grecque et
significativement encyclopedique. Aucun des deux versants de la
tradition medievale n'apporte un element nouveau it la construction
aposteriorique ou retrospective des langues anciennes. La philologie
medievale confirme l'idee d'une persistance tautologique du modele
originel. et atteste, presque paradoxalement, la dependance epistemologique
de la philologie par rapport it son objet. Toute science certes est
constitutivement soumise it son objet: dans Ie cas de la philologie, la
soumission est forte et revet une forme presque structurelle. L'objet de
la philologie est la langue, sa methode la langue, son moyen et sa fin
encore la langue. La tautologie est par consequent de nature linguis-