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EN QUETE D'UNREEL LINGUIST/QUE /73
l'epoque homerique. dont les anciens, presque autant que les modernes.
eussent ete bien en peine de dire au reste ce qu'elle etait ; Lysias n'est
pas l'orateur-type du siecle classique ; Sophocle n'est pas Ie dramaturge
du siecle de Pericles. En tout cas. pas seulement et certainement pas de
la maniere dont l'entend l'historiographie moderne.
Les anciens. lorsqu'ils entreprirent d'organiser leur propre passe, ne
pensaient pas en termes de chronologie mais avant tout de genres
litteraires. C'est ainsi que prirent forme des ensembles et des sousensembles.
organises notamment par genres: l'epopee. la tragedie, Ie
lyrisme, l'histoire. la prose oratoire, etc. Les auteurs existaient comparativement
a l'interieur de ces ensembles-lao lIs existaient individuellement
et collectivement. lIs existaient surtout collectivement, dans
Ie sens OU leur ceuvre etait fondamentalement liee a la vie de la cite;
Homere et Hesiode racontent Ie passe mythique de la Grece ; Herodote
et Thucydide plongent dans ce qui ne s'appelle pas encore l'histoire ;
Eschyle, Sophocle et Euripide emeuvent et font pleurer en evoquant les
malheurs des hommes a travers les heros de la legende nationale ;
Aristophane et Menandre tendent un miroir comique aux hommes de
leur temps et de leur cite; Pindare et Bacchylide chantent pour leurs
contemporains les exploits des vainqueurs aux jeux ; Demosthene et
Isocrate ecrivent et parlent au nom de la cite. etc. Aucun ne fait ceuvre
seulement pour soi. Certes Sappho chante ses tourments, Isocrate
mentionne des episodes de sa vie personnelle, Platon s'inscrit explicitement
dans la filiation de Socrate et met en scene des contemporains. etc.,
mais cette manifestation de la subjectivite est peu de chose - et jamais
determinante - au regard de la mission collective dont tous se sentent
investis.
C'est avec precaution par consequent que Ie terme tradition doit etre
applique a - c'est-a-dire a l'interieur de - l'antiquite, grecque du
moins. Le mot peut etre entendu de deux fa