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Spectrum_2_2020

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DOSSIER

Texte Amélie Gyger et Sylvain Cabrol

Illustration Antoine Bouraly

Abonnements à la chaîne,

le nouveau servage

On l’appelle « économie de l’abonnement » et c’est la nouvelle laisse au cou des consommateur∙rice∙s.

De propriétaire, l’acheteur∙euse devient simple locataire de services.

Comment en est∙on arrivé∙e∙s là ? Et à quel prix ? Mise au point.

La révolution numérique a accouché

d’un monstre : l’abonnement. Alors

qu’elle devait être synonyme de libération,

voire de gratuité, nous nous retrouvons

à allonger la monnaie chaque mois pour

conserver l’accès à des services, là où auparavant

nous payions une fois pour toutes

pour un produit. Et ça commence à faire

mal aux fesses.

Aux origines d’un modèle économique

« plein d’avenir »

L’abonnement trouve son origine dans le

domaine de l’édition et les infrastructures

de réseaux. L’objectif ? Garantir l’accès à

des services essentiels (eau, électricité, télécom)

ou proposer des biens et services

pour une durée limitée selon les envies de

chacun∙e.

Ce modèle connaît un nouvel essor au

tournant du siècle, en particulier

grâce aux TIC (technologies de l’information

et de la communication) : certains

formats tels que les jeux vidéo en ligne

(World of Warcraft) ou le streaming (Netflix,

Spotify) impliquent par leur nature

même un abonnement. Parfois, celui-ci

apparaît comme une alternative raisonnable

à l’achat d’un produit au coût prohibitif

: c’est le cas d’Adobe et Microsoft

Office. Ces formules s’accompagnent de

fonctionnalités supplémentaires, comme

le Cloud et des mises à jour régulières, et

ont rendu leurs produits plus accessibles.

Et avec les smartphones, les abonnements

se sont étendus aux applications mobiles.

Quand l’économie de services devient

racket

Les chantres de l’abonnement peuvent

voir l’avenir en rose. Selon le magazine

Challenges (14 février), ce modèle économique

a entraîné une forte augmentation

du nombre d’utilisateur∙rice∙s, mais

aussi des chiffres d’affaire.

Si l’idée semble bonne a priori, les

choses se compliquent quand le∙la

consommateur∙rice est captif∙ve et que

son choix est restreint. Adobe est déjà

passé au tout-abonnement, Microsoft

en prend le chemin, et d’autres acteurs

plus surprenants suivent la tendance.

L’usager∙ère se trouve à la merci de

changements de modèle économique

parfois intempestifs. Et les abus se

multiplient. Le Figaro (3 février) cite un

exemple frappant, celui de Fantastical,

un agenda largement apprécié par les

utilisateur.rice.s d’IPhone. Autrefois

au prix d’achat de 5,49 euros, il faudra

maintenant débourser cette somme

tous les mois pour y avoir accès.

Economie et écologie ont bon dos

Comment justifier ces tarifs croissants ?

Le coût des mises à jour est-il si élevé

? Impossible de ne pas se poser la

question en constatant les revenus

conséquents que peut générer l’abonnement.

Outre l’argument du pouvoir

d’achat, ses promoteur∙rice∙s sortent

parfois la carte de l’écologie, notamment

quand il est question d’appliquer

ce modèle à l’électroménager : les

constructeur∙rice∙s, soucieux∙euses de

faire durer le produit, renonceraient à

l’obsolescence programmée.

La généralisation de l’abonnement pose

la question de la liberté réelle dans une

économie dite « libérale » : plutôt que de

faciliter l’accès à des services trop chers

par ce biais, ne devrait-on pas faire baisser

les coûts pour permettre à chacun∙e d’acquérir

ces biens en conservant son indépendance

? Si l’abonnement a ses vertus,

prenons garde à ce qu’il ne fasse pas de

nous les sujets taillables et corvéables d’un

corporatisme triomphant. ■

Sources : https://www.lefigaro.fr

www.challenges.fr

14 spectrum 03.2020

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