PSC 8-9-10 - bei der Föderation der Schweizer Psychologinnen und ...

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01.12.2012 Aufrufe

18 DOSSIER: la démence PSYCHOSCOPE 8-9/2010 Utilité et nécessité de l’approche systémique Comme on l’a déjà dit, la particularité de la plupart des patients atteints de démence réside dans leur incapacité à reconnaître qu’ils sont malades, cela déjà au stade débutant de la maladie. De plus, leurs troubles cognitifs altèrent leur capacité à prendre des décisions raisonnées et raisonnables. Dès lors, ce sont les proches qui vont devoir endosser la plupart des responsabilités à leur place, ce qui n’est déjà pas aisé en soi. Cela se complique encore lorsque le patient s’oppose à ces décisions, car, ne se sentant pas malade, il n’en voit ni le sens ni l’utilité. Il peut alors se sentir persécuté par ses proches et devenir agressif à leur égard. Cette situation malheureusement fréquente nous oblige à adopter une vision globale, qui tient compte du patient, de sa famille, ainsi que du réseau de professionnels qui gravitent autour de lui. L’approche systémique s’avère aussi particulièrement indiquée, car elle permet de prendre en compte les mécanismes du fonctionnement familial impliqués dans la prise en charge du patient. Enfin, cette approche englobe la dimension relationnelle mise à rude épreuve dans le cas où un des membres de la famille est atteint de démence. Pour mieux illustrer l’intérêt de l’approche systémique dans la prise en charge de la démence d’origine dégénérative, je vais exposer une situation clinique. Dans cet exemple concret, on verra que l’entretien se déroule la plupart du temps sans le patient. Il y a deux principales raisons à cela: d’une part, le patient peut soit mal accepter, soit peu comprendre ce qui se discute, si bien qu’il en résulte une tension émotionnelle vive chez lui. D’autre part, il s’agit d’un soutien bien spécifique pour les besoins et préoccupations des proches. Cela ne veut pas dire que le patient n’en a pas, mais ils sont différents et doivent être pris en charge différemment en raison de la démence qui altère la perception de la réalité. Enfin, ces entretiens se veulent un moment où les proches peuvent se permettre de raconter ce qu’ils vivent sans tabou, ce qu’ils ne feraient pas en la présence du patient par peur de le contrarier ou de le blesser. Vignette clinique Un couple vient à la consultation mémoire pour un bilan cognitif de Monsieur. Le diagnostic de démence de la maladie d’Alzheimer, stade débutant, est posé. A noter que ce couple vient d’être à la retraite depuis 2 ans et qu’ils avaient imaginé des projets pour cette nouvelle étape de leur vie. Suite à la transmission du diagnostic, nous proposons un suivi psycho-éducatif pour Madame, car elle semble très affectée par cette nouvelle. Madame accepte et, au fil des entretiens, elle manifeste une certaine fatigue morale, si bien que nous lui pro- posons que son mari aille un jour par semaine dans un foyer de jour afin qu’elle ménage ses forces. Madame est très ambivalente à ce sujet, elle appréhende la réaction de son mari et a le sentiment de l’abandonner. Elle nous apprend que Monsieur était toujours le leader du couple. Dès lors, elle imagine mal prendre l’initiative d’une décision comme le foyer de jour. Nous proposons de la voir avec son mari pour l’aider à lui en parler et elle accepte. Monsieur ne se montre pas totalement opposé, mais, en raison de ses troubles cognitifs, il est partiellement convaincu, oubliant très vite la raison de cette offre. Lorsqu’on revoit Madame seule, elle n’a pas réussi à se décider et nous apprenons plus tard qu’elle a dû être hospitalisée en psychogériatrie pour épuisement moral sévère et état dépressif. Ce ne sera donc qu’après cet épisode qu’elle pourra petit à petit accepter de décider sans et pour son mari de la pertinence d’un foyer de jour. On voit ici comment le fonctionnement habituel du couple, l’enjeu de la loyauté au malade et la difficulté à renverser les rôles conditionnent la capacité d’adaptation de Madame aux difficultés liées à la maladie de son mari. Dans ces situations où le conjoint malade est celui qui avait le leadership dans le couple, il est habituel de se trouver dans une telle impasse. Une des stratégies peut être de faire venir les enfants pour qu’ils puissent aider le conjoint sain à prendre des décisions, mais il faut que ce dernier accepte l’implication des enfants. Conclusion Les démences dégénératives, et surtout la maladie d’Alzheimer, sont devenues depuis une vingtaine d’années un objet d’étude prisé par les scientifiques. Ces recherches n’ont malheureusement pas encore permis d’aboutir à un traitement curatif probant. Néanmoins, elles ont débouché sur une amélioration de la compréhension et de la prise en charge de cette pathologie organique. Au niveau de la prise en charge, l’importance du suivi psychologique de l’entourage peut se résumer en reprenant l’un des principes de base de l’approche systémique: l’apparition de la maladie dans le système modifie l’ensemble des éléments du système et la relation entre eux. Si l’intervention psychologique ne permet pas de supprimer totalement la souffrance que représente une telle maladie, elle peut tout de même l’alléger en ayant offert la possibilité de l’exprimer et de la partager. Sandra Vifian

Quelques chiffres pour la maladie d’Alzheimer en Suisse Prévalence: • à 65 ans: 2%, • à 85 ans: 20%, • à 90 ans: 40%. Durée moyenne d’évolution: 5 à 9 ans; plus rapide pour les formes préséniles (avant 65 ans). En 2008: 102’000 personnes sont atteintes de la maladie d’Alzheimer ou d’une autre forme de démence et 24’700 nouveaux cas sont recensés chaque année. 1400 malades Alzheimer vivent à domicile. 60% des résidents des EMS sont des malades Alzheimer. Coûts directs pour le système de santé: fr. 16’000.-/an pour un malade à domicile, fr. 73’000.-/an pour un malade en institution. Bibliographie Michon, A. (2006). La gestion de la crise dans la démence. Psychologie & NeuroPsychiatrie du Vieillissement IV (2), 121-125. Monsch, A.U. et al. (Groupe d’experts en Suisse) (2008). Consensus sur le diagnostic et la prise en charge des patients atteints de démence en Suisse. Forum Med Suisse VIII (8), 144-149. Lethiais, L. & Leborgne, K. (2008). La thérapie familiale comme approche contextuelle en psychogériatrie. Neurologie-Psychiatrie-Gériatrie (NPG) VIII (46), 27-29. Delage, M. & Lejeune, A. (2009). La résilience de la personne âgée, un concept novateur pour prendre en soin la dépendance et la maladie d’Alzheimer. Marseille: Solal. L’auteure Sandra Vifian a obtenu sa licence en psychologie clinique en 1993. Elle possède un certificat en interventions systémiques à l’INPER de Lausanne, obtenu en 2001, ainsi qu’un diplôme de thérapeute de famille de l’Université de Genève (2009). Depuis 1997, elle travaille en psychogériatrie, durant 7 ans à la Consultation mémoire de la Policlinique universitaire de psychogériatrie (PUP) de Lausanne et depuis 2005 au Centre neuchâtelois de psychiatrie (CNP), filière de l’âge avancé, site de Perreux (Boudry, NE). Elle est responsable de la consultation mémoire et psychologue spécialisée en approche systémique pour toute la filière de l’âge avancé. Adresse Sandra Vifian, Centre neuchâtelois de psychiatrie (CNP), filière de l’âge avancé, site de Perreux, 2017 Boudry sandra.vifian@cnp.ch Zusammenfassung Die Psychologin Sandra Vifian erklärt, dass zwischen Demenz und gewöhnlichem Alterungsprozess zwar ein Unterschied besteht, die für die Angehörigen schockierende Diagnose jedoch nicht zwangsläufig mit einer psychischen Erkrankung der Patienten einhergehen muss. Vielmehr führt der Abbau der kognitiven Funktionen zuerst zu einem Selbständigkeitsverlust bei den Alltagsfähigkeiten. Die häufig als Folge dieses Prozesses von Stimmungs- und Verhaltensveränderungen begleiteten Demenzerkrankungen können in degenerative und vaskulär bedingte Erkrankungsformen unterteilt werden: Die häufigste degenerative Form ist Alzheimer. Obschon die Diagnose erst nach dem Tod 100-prozentig feststeht, ist eine Früherkennung durch interdisziplinäre Untersuchungen möglich. Zudem sind im Allgemeinen systemische Massnahmen sinnvoll, da die Krankheit schwerwiegende Auswirkungen auf die Angehörigen hat, die ein hohes Risiko für Erschöpfungszustände und soziale Isolation tragen. 19

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DOSSIER: la démence<br />

PSYCHOSCOPE 8-9/20<strong>10</strong><br />

Utilité et nécessité de l’approche systémique<br />

Comme on l’a déjà dit, la particularité de la plupart des<br />

patients atteints de démence réside dans leur incapacité<br />

à reconnaître qu’ils sont malades, cela déjà au stade débutant<br />

de la maladie. De plus, leurs troubles cognitifs<br />

altèrent leur capacité à prendre des décisions raisonnées<br />

et raisonnables. Dès lors, ce sont les proches qui<br />

vont devoir endosser la plupart des responsabilités à<br />

leur place, ce qui n’est déjà pas aisé en soi.<br />

Cela se complique encore lorsque le patient s’oppose à<br />

ces décisions, car, ne se sentant pas malade, il n’en voit<br />

ni le sens ni l’utilité. Il peut alors se sentir persécuté par<br />

ses proches et devenir agressif à leur égard.<br />

Cette situation malheureusement fréquente nous oblige<br />

à adopter une vision globale, qui tient compte du patient,<br />

de sa famille, ainsi que du réseau de professionnels<br />

qui gravitent autour de lui.<br />

L’approche systémique s’avère aussi particulièrement<br />

indiquée, car elle permet de prendre en compte les mécanismes<br />

du fonctionnement familial impliqués dans<br />

la prise en charge du patient. Enfin, cette approche englobe<br />

la dimension relationnelle mise à rude épreuve<br />

dans le cas où un des membres de la famille est atteint<br />

de démence.<br />

Pour mieux illustrer l’intérêt de l’approche systémique<br />

dans la prise en charge de la démence d’origine dégénérative,<br />

je vais exposer une situation clinique.<br />

Dans cet exemple concret, on verra que l’entretien se<br />

déroule la plupart du temps sans le patient. Il y a deux<br />

principales raisons à cela: d’une part, le patient peut<br />

soit mal accepter, soit peu comprendre ce qui se discute,<br />

si bien qu’il en résulte une tension émotionnelle vive<br />

chez lui. D’autre part, il s’agit d’un soutien bien spécifique<br />

pour les besoins et préoccupations des proches.<br />

Cela ne veut pas dire que le patient n’en a pas, mais ils<br />

sont différents et doivent être pris en charge différemment<br />

en raison de la démence qui altère la perception<br />

de la réalité. Enfin, ces entretiens se veulent un moment<br />

où les proches peuvent se permettre de raconter<br />

ce qu’ils vivent sans tabou, ce qu’ils ne feraient pas en<br />

la présence du patient par peur de le contrarier ou de le<br />

blesser.<br />

Vignette clinique<br />

Un couple vient à la consultation mémoire pour un bilan<br />

cognitif de Monsieur. Le diagnostic de démence de<br />

la maladie d’Alzheimer, stade débutant, est posé. A noter<br />

que ce couple vient d’être à la retraite depuis 2 ans<br />

et qu’ils avaient imaginé des projets pour cette nouvelle<br />

étape de leur vie. Suite à la transmission du diagnostic,<br />

nous proposons un suivi psycho-éducatif pour Madame,<br />

car elle semble très affectée par cette nouvelle.<br />

Madame accepte et, au fil des entretiens, elle manifeste<br />

une certaine fatigue morale, si bien que nous lui pro-<br />

posons que son mari aille un jour par semaine dans un<br />

foyer de jour afin qu’elle ménage ses forces. Madame<br />

est très ambivalente à ce sujet, elle appréhende la réaction<br />

de son mari et a le sentiment de l’abandonner. Elle<br />

nous apprend que Monsieur était toujours le lea<strong>der</strong> du<br />

couple. Dès lors, elle imagine mal prendre l’initiative<br />

d’une décision comme le foyer de jour. Nous proposons<br />

de la voir avec son mari pour l’ai<strong>der</strong> à lui en parler et<br />

elle accepte. Monsieur ne se montre pas totalement<br />

opposé, mais, en raison de ses troubles cognitifs, il est<br />

partiellement convaincu, oubliant très vite la raison de<br />

cette offre. Lorsqu’on revoit Madame seule, elle n’a pas<br />

réussi à se déci<strong>der</strong> et nous apprenons plus tard qu’elle<br />

a dû être hospitalisée en psychogériatrie pour épuisement<br />

moral sévère et état dépressif. Ce ne sera donc<br />

qu’après cet épisode qu’elle pourra petit à petit accepter<br />

de déci<strong>der</strong> sans et pour son mari de la pertinence d’un<br />

foyer de jour.<br />

On voit ici comment le fonctionnement habituel du<br />

couple, l’enjeu de la loyauté au malade et la difficulté<br />

à renverser les rôles conditionnent la capacité d’adaptation<br />

de Madame aux difficultés liées à la maladie de<br />

son mari. Dans ces situations où le conjoint malade est<br />

celui qui avait le lea<strong>der</strong>ship dans le couple, il est habituel<br />

de se trouver dans une telle impasse. Une des stratégies<br />

peut être de faire venir les enfants pour qu’ils<br />

puissent ai<strong>der</strong> le conjoint sain à prendre des décisions,<br />

mais il faut que ce <strong>der</strong>nier accepte l’implication des enfants.<br />

Conclusion<br />

Les démences dégénératives, et surtout la maladie<br />

d’Alzheimer, sont devenues depuis une vingtaine d’années<br />

un objet d’étude prisé par les scientifiques. Ces<br />

recherches n’ont malheureusement pas encore permis<br />

d’aboutir à un traitement curatif probant.<br />

Néanmoins, elles ont débouché sur une amélioration<br />

de la compréhension et de la prise en charge de cette<br />

pathologie organique.<br />

Au niveau de la prise en charge, l’importance du suivi<br />

psychologique de l’entourage peut se résumer en reprenant<br />

l’un des principes de base de l’approche systémique:<br />

l’apparition de la maladie dans le système modifie<br />

l’ensemble des éléments du système et la relation entre<br />

eux.<br />

Si l’intervention psychologique ne permet pas de supprimer<br />

totalement la souffrance que représente une<br />

telle maladie, elle peut tout de même l’alléger en ayant<br />

offert la possibilité de l’exprimer et de la partager.<br />

Sandra Vifian

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